Si je n'ai pas à dire de gros mot, alors ce crétin n'avait pas à me doubler dans la file. Je n'ai fait que me défendre, on peut pas me disputer pour ça, même si j'ai jeter de la terre dans les yeux du crétin. Au moins, il ne reviendra plus m'embêter.

- Mais P'pa...il m'a doublé dans la file et il m'a poussé.

Pas possible qu'il ne comprenne pas ça. J'y suis pour rien, je voulais juste me prendre une saucisse quand cette idiot est arrivé devant moi. Pour le feu, j'y suis pas vraiment pour quelque chose...je crois que j'y suis même pour rien, c'est à cause du crétin aussi. Je regarde le type avec son chapeau en feu...avec toute cette eau qui lui a été lancé, il est beaucoup plus inondé qu'autre chose à présent. En tout cas, j'ai plus envie de manger, ça m'a coupé la faim cette histoire...enfait, c'est surtout que la grosse voix résonne à nouveau: Le numéro de Gipsy va commencer !

- P'pa ! Faut y aller !

Pas de temps à perdre, je veux pas louper Gipsy. Je prend la main de mon Papa et on s'éloigne du barbecue, peut-être que j'aurais à nouveau faim après le spectacle. Je retrouve Léo, avec Matthew et Kyle. Je lui raconte ma bataille avec ce crétin de tout à l'heure pendant qu'on se dirige vers le spectacle. Déjà plein de monde s'y trouve et plus de place devant. Y a trop de grand à cette fête de la citrouille.

Soudain de la musique surgit de nul part et tout le monde autour de nous commence à applaudir...mais qu'est-ce qu'ils applaudissent ? On se regarde avec Léo...maintenant, c'est chacun pour sois. On se jette tout les deux vers Papa, bras levé.

- P'pa...non, porte moi, moi !
- Non, moi !
- Non, c'est pas toi qui à combattu...j'ai le droit d'avoir la place !
- Alors porte nous tous les deux !
- Ouai, vas-y...tous les deux !

Je me demande ce qu’il faudrait à Matt pour se bouger en dehors du boulot. Un attentat terroriste ? La menace d’une explosion imminente ? Une invasion extraterrestre ? Parce qu’il est clair qu’un petit incident de barbecue ne le concerne pas. Je dirais même que ça ne lui fait ni chaud ni froid vu comment il déguste sa saucisse sans porter la moindre attention à l’attroupement qui s’est formé. A sa décharge, il se préoccupe au moins de l’état de santé de Mr Potter et réussit à lui faire retrouver un rythme de respiration normale. Après quoi ce dernier va récupérer son fils tandis que Matt et moi on se retrouve de corvée de baby-sitting. Bon, la tâche a été confiée à Matt mais on peut supposer que si je suis là aussi, je ne peux pas faire comme ça si ça ne me concernait pas du tout. On ne s’appelle pas tous Matthew Scott.

Heureusement Mr Potter et son fils reviennent vite, nous évitant un silence lourd. Le jumeau qu’on a gardé semble en effet parfaitement heureux à tenter de deviner ce que son père est en train de dire à son frère plutôt que de tenter de taper la discut’. Ce qui ne l’empêche cependant pas de boire la moindre parole de son jumeau quand celui-ci arrive pour lui expliquer toute l’histoire. La moue qu’il fait démontre alors que quelque chose dans les paroles de Luka ne lui a pas plu mais je ne saurais dire si c’est l’action du gamin qui a attaqué son frère lou la réaction de ce dernier. Quoiqu’il en soit, on se dirige tous vers le lieu du spectacle sur le point de commencer et le petit numéro des jumeaux pour se faire porter m’amuse grandement. Je propose donc mon aide.

-Si ça vous dit, je peux en porter un sur mes épaules. J’ai de l’expérience, j’ai une petite cousine tout juste un peu plus jeune que vous.

Enfin, je crois qu’elle est plus jeune. Parce qu’à vrai dire je n’ai jamais retenu l’âge exact des frères d’Alix. Je me souviens simplement qu’ils étaient nés à peu près dans les mêmes eaux que la fille de ma tante maternelle. Elissa doit avoir environ cinq maintenant je crois. Faut dire aussi que je n’ai pas tant l’occasion de la croiser que ça puisqu’elle vit, au même titre que toute ma famille maternelle, en Italie. La dernière fois qu’on leur a rendu visite c’était l’été de ma diplomation ce qui commence déjà à remonter. Mais j’ai souvenir que la mioche adorait être portée dans les airs. Et comme ce n’était certainement pas son père ou le mien qui allaient s’abaisser à ce genre de comportement, il ne restait plus que moi pour m’y coller. Et j’ai trouvé ça plutôt sympa. Reste que je pense quand même que des gamins de six-sept ans, garçons hyperactifs par-dessus le marché, seront moins faciles à porter qu’une petite princesse de trois-quatre ans. Enfin, je doute qu’ils soient contre, je suis après tout aussi grand que leur père. Bon Matt m’a l’air d’être le plus grand de nos trois mais je doute qu’il soit motivé pour jouer les chevaux humains. Tout le contraire même.

Pour encourager Gipsy, on fait le concours de celui qui criera le plus fort avec Léo et aussi celui qui applaudira le plus vite. Tout le monde applaudit et encourage Gipsy qui finit enfin par se montrer. Je ne sais pas encore ce qu'il va faire, mais j'imagine que ça va être super, comme la dernière fois...peut-être qu'aujourd'hui, il va se transformer en je ne sais pas quoi, ou peut-être qu'il va apprendre à voler, ou peut-être qu'il va cracher du feu...mais je pensais pas qu'il allait faire des mathématique.

1+1...trop facile. 2+2 aussi. Moi aussi je sais compter et c'est pour autant que P'pa en fait un spectacle. Quoi que parfois que parfois il me dit qu'il serait à deux doigts de m'applaudir quand je finis mes devoirs. À croire que je suis trop lent pour les faire. Je veux que Gipsy arrête de compter, parce que si je voulais vraiment entendre des calculs, P'pa et M'man nous auraient emmené à l'école. En plus, Gipsy commence à faire n'importe quoi, tout le monde sait que 10 + 10 ça fait pas tout ça comme chiffre...ça fait...bref, je suis sûr que ça fait pas tout ça. Et Tarouik n'arrange rien, il pose des trucs bizarre avec les chiffres. Y a plus de « + », mais des « fois » et des « dix visées »...pourquoi il parle des racines en carrées. J'y comprend rien. En attendant que Gipsy fasse autre chose je m'amuse à faire des nœuds dans les cheveux de P'pa. Même des doubles nœuds et des boucles.

Si je m’ennuie un peu, c'est pas le cas de Léo qui arrête pas de compter sur ses doigts les coups de sabots de Gipsy et applaudit à chaque fois. Parfois, je le comprends pas trop non plus Léo, il aime des trucs trop bizarre. C'est le seul qui peut s'amuser avec un livre... s'il continu, il va devenir un 'nain thé l'eau' et tout le monde sait que les 'nain thé l'eau' se transforme en rapporteur un jour ou l'autre. Léo va devenir un soldat du maître, comme ce fayot de William à l'école. C'est lui qui nous a balancé moi et Zéphyr quand on a voulu s'aider pendant l'interro du maître. Heureusement, avec Zéphyr ont s'est bien vengé, on la coincé dans la cour de récré et on lui a farci le pantalon avec de la terre qu'on avait récupéré sur le nid de fourmi de l'école.

Après avoir regardé Léo s'éclater comme 'nain thé l'eau', je jettes un coup d’œil sur le Kyle. Si je comprends bien, c'est un ami de Matthew. Même que Matthew, lui, il n'a pas de copine, mais un copain, c'est M'man qui me l'a dit. C'est bizarre, mais c'est pareil. Enfait, c'est un copain, mais qui remplace une copine. Enfin, moi, je dis que c'est comme un pote de bisous.
Je regarde à nouveau Gipsy qui continu de taper des sabots. C'est long. Je regarde à nouveau Kyle...

- Hey, c'est toi le copain des bisous de Matthew ?

Whah je ne me souvenais pas que le professeur Potter fût capable d’autant de diplomatie. Dans mes souvenirs, à l’époque de Poudlard, quand quelqu’un ne lui revenait pas, s’il avait une raison valable de le remettre à sa place, il s’en donnait à cœur joie. Pourtant, force est de constater qu’il vient de me rembarrer franchement gentiment. Ce pour quoi je ne peux m’empêcher de ressentir une pointe d’orgueil. Il a beau ne pas me vouloir trop près de ses enfants – ce qui est dans le fond totalement compréhensible, même s’il se souvenait de moi ce qui n’a pas vraiment l’air d’être le cas, qui lui dit que je ne me suis pas transformé en psychopathe pédophile depuis la dernière fois qu’on s’est vus ? – il me tient en suffisamment haute estime pour refuser mon offre dans les formes. Et puis si au passage, Matt doit se taper un gamin de six ans dans les pattes, finalement c’est du 100% gagnant pour moi. Je ne retiens par conséquent pas un ricanement assez gamin devant l’air dépité du principal concerné.

Ils prennent néanmoins chacun un des jumeaux sur leurs épaules et on tourne tous notre attention vers le spectacle sur le point de commencer. Spectacle surprise qui n’a pas le même effet sur chacun des deux gosses. Si celui sur les épaules de Matt – Léo je crois – a l’air aux anges devant les opérations toujours plus compliquées que le dromadaire est capable de résoudre, celui sur les épaules de Mr Potter – Luka donc, si le premier c’est Léo – a l’air nettement moins enthousiaste. Quelque chose me dit qu’ils ne seront pas dans la même maison une fois arrivés au château ces deux-là. Je verrais bien le premier dans la meilleure des maisons, j’ai nommé celle des Aigles, tandis que le second suivrait les traces familiales chez les Lions.

Enfin, en ce qui me concerne, je suis moins passionné par le spectacle que par la façon dont le fameux Tarouik réussit son tour. Soit il a conditionné son dromadaire d’une façon ou d’une autre, soit bien plus intéressant, il a réellement réussi à lui apprendre les principes de base des mathématiques auquel cas je serais plus qu’intéressé par une petite conversation avec lui. C’est que ce n’est pas sous prétexte que j’ai choisi un métier plutôt manuel que ma curiosité intellectuelle s’est éteinte pour autant. Serdaigle un jour, Serdaigle toujours. Je suis néanmoins sorti de mes conjectures sur la façon dont Tarouik a bien pu se débrouiller pour obtenir les résultats qu’il nous présente aujourd’hui par la voix d’un des deux gamins qui s’adresse à moi.

Sa question me laisse d’abord un peu perplexe. Copain de bisous ? C’est censé vouloir dire quoi ? Et soudain l’illumination se fait et j’ai honte de n’avoir pas compris de suite. Copain de bisous, je veux dire l’expression parle d’elle-même ! Le copain qui fait des bisous, autrement dit le petit copain. J’explose alors de rire devant l’incongruité de sortir avec Matt. Non merci, sans compter que ce serait presque de l’inceste vu que je le considère comme une sorte de grand-frère, je ne me connais pas d’intérêt particulier pour le sexe fort – du moins jusqu’à aujourd’hui – et puis bon, soyons honnêtes cinq minutes, je ne pourrais pas vivre avec Matt en permanence. L’un de nous deux finirait par tuer l’autre et sachant que les probabilités ne sont pas de mon côté pour être celui qui en réchapperait, merci bien mais je passe la main. Je me reprends donc et répond au gamin qui doit me prendre pour un fou maintenant.

-Non, non, ce n’est pas moi du tout. Matt est juste un copain, sans les bisous inclus. Mais si tu veux en savoir plus, je suis sûr qu’il sera ravi de t’expliquer ça plus en détails.

Ou de comment signer son arrêt de mort avec un sourire faussement angélique sur le visage.

Pourquoi rire à ma question ? Elle est pas bête ma question. Et si je suis bien curieux, c'est parce que je ne sais pas. Pourquoi je veux savoir ça ? Parce que j'ai envie. C'est toujours bizarre la réaction des grands quand on leur pose une question. Pourtant, M'man m'a toujours dit que toutes les questions étaient bonne à poser, même si parfois elle me fait les gros yeux; comme la fois où j'ai demandé à Pustula pourquoi le cousin Dudley cachait des livres de fille et de garçon pas très habillé sous son lit. Quoi que là, personne n'a vraiment rit à cette question.

Kyle n'est donc qu'un copain pot de colle. Je ne savais pas que ce genre de copain existait, et à quoi ça sert un pot de colle ? À coller des trucs à sa place ? Je regarde Kyle, il n'a pas l'air d'avoir collé le moindre truc depuis qu'il est ici, sauf s'il le fait super discrètement.
Le copain de bisous s'appel Théodorian. Je le connais pas, je l'ai jamais vu...enfin, je crois. Matthew doit sûrement faire une collection de copain, un pour chaque truc. Moi, Zéphyr, tout seul, il me suffit, parce qu'on fait tout, sauf les bisous. En même temps, j'ai pas besoin de bisous et Zéphyr non plus.

- Bah parce que...M'man m'a dit que tu n'avais pas de copine, mais un copain. Et quand je lui ai demandé si c'était comme Zéphyr, elle m'a dit que non...que ton copain à toi, c'était un copain de bisous. C'est un peu comme un doudou. C'est marrant.

Ouai, c'est marrant, c'est comme si mon Jack était mon de bisous, sauf que moi c'est plus des câlins. Donc Jack est un copain de câlin. Finalement, moi aussi je commence à avoir une collection de copains. Il me manque un pot de colle, comme Kyle. Je me demande bien où je vais pouvoir en trouver un.
D'un coup, Gipsy s'est mit à crier et aussitôt Léo s'est mit à applaudir. Je vais aussi applaudir, même si c'est pas mon truc les calculs. Je jettes un œil sur la danse de Gipsy, par contre, ça j'aime bien. Je voudrais bien faire danser Iago comme ça, mais ça va demander beaucoup de travail...et j'ai pas le temps pour le travail en ce moment.

- En fait, si je comprend bien...tu prends ton copain pot de colle pour sortir. Et ton copain de bisous...tu le ranges en attendant ? Parce que bon, je t'ai jamais vu avec. Hein, P'pa, qu'on le voit jamais avec ? Toi aussi tu as un pot de colle comme Kyle ?

Je me penche sur le côté pour voir si P'pa m'a bien entendu. C'est vrai, ça. Est-ce qu'il a un copain pot de colle ? Je pense pas que ce soit R'mus, ni S'rius. Il parle jamais d'eux comme des pots de colle.

La logique enfantine est imparable. Et parfois d’une clarté désarmante. Un copain de bisous c’est comme un doudou. Dans un sens c’est vrai. Un doudou, on se couche avec lui, on le câline et on lui fait des bisous. La dimension sexuelle en moins bien entendu, mais mieux vaut ne pas emmener un gamin pré-pubère dans cette direction. Encore moins quand la mère du dit gamin est un danger public à tendance surprotectrice.

J’écoute donc avec attention la suite du raisonnement du gosse Potter sans même relever l’adjectif « pot-de-colle » accolé à mon nom. Je l’ai bien cherché, je ne vais donc pas m’offusquer pour si peu. Surtout qu’au moins au début de notre relation, « pot-de-colle » est une expression qui m’aurait relativement bien décrit. Mon admiration pour Matt frisait avec l’obsession et je le suivais partout dans les couloirs de Sainte Mangouste dès que nos emplois du temps le permettaient. Certains collègues de Matt s’étaient même mis à m’appeler son « toutou » mais ça m’était complètement égal. L’avis des autres en règle générale je m’en tamponne tant que mes objectifs sont atteints. Et à l’époque c’était me rapprocher le plus possible du Médicomage Scott pour tenter de percer le mystère qu’il représentait, lui qui était à la fois un travailleur de génie et un asocial de première. Or, en règle générale, on peut s’imaginer que celui qui choisit de sauver des vies a un minimum d’intérêt pour le bien-être d’autrui. D’où le paradoxe que représentait Matt.

Sauf que, lorsqu’à force de persévérance, je réussis à percer une partie de ses barrières, mon intérêt pour lui au lieu de disparaître ne fit que se décupler et je tentais alors de devenir son ami. Ce ne fut pas une tâche aisée, plutôt même un chemin semé d’embûches mais le jeu en valait définitivement la chandelle. Car pour autant que je continue à m’amuser en taquinant Matt, je sais qu’il m’apprécie sincèrement et ça c’est un privilège auquel peu ont droit. Après tout, nous avons une relation quasi fraternelle. Pas des frères fusionnels, loin de là, mais typiquement la relation grand frère blasé mais protecteur, petite frère chiant mais adulateur. Et autant vous dire que ça marche bien mieux que ce que j’aurais pu imaginer dans un premier temps.

La suite des paroles de Luka vaut aussi son pesant d’or car le voilà qui, après avoir embarrassé comme il se doit Matt, s’en prend à son père, lui demandant si lui aussi à un « copain pot-de-colle ». Et étrangement, je me retrouve à être aussi intéressé par la question que son fils. C’est que ce n’est pas tous les jours qu’on apprend des détails croustillants sur la vie personnelle de ses anciens professeurs. Alors je serais curieux de savoir si Mr Potter possède bien un ami qui serait mon équivalent. Croyez-moi je serais honoré de le rencontrer. Malheureusement, je crains d’être un cas unique. Après tout, ma relation avec Matt n’est pas des plus courantes. Mais bon qui sait, peut-être serais-je surpris.

Peter. C'est vrai qu'on ne le connaît pas et je me demande bien pourquoi. Je ne me souviens pas non plus que P'pa ait déjà parlé de ce Peter. Je regarde Léo qui n'en sait pas plus que moi, mais je n'ai pas eu le temps d'en demander plus que Matthew nous demande de regarder Gipsy.

C'est vrai qu'il est fort le Gipsy, ça danse est un peu bizarre, mais ça reste fort. Il faudrait que j'essaie de faire la même chose avec Iago, vraiment. Je suis sûr qu'on peut arriver à quelque chose de bien, peut-être même aussi bien que Gipsy. Tout le monde applaudit, en rythme et Gipsy accélère la danse. On dirait même que ses pattes s'emmêle tellement qu'il va vite. Dommage que Zéphyr ne voit pas ça, il serait aussi impressionné, je vois déjà leur tête à l'école quand je vais leur raconter ce que j'ai fais ce week-end. Je sais que certains ne vont pas me croire, mais j'm'en fous, je sais que Zéphyr va me croire lui.

Gipsy fait la danseuse étoile, sur ses pattes arrières, il est plus grand que tout le monde, peut-être même qu'il aussi grand qu'un dinosaure, ou un dragon. Parce que les dragons et les dinosaures, c'est un peu la même chose, sauf que les dinosaures n'existent plus. Quoi qu'un jour, Léo m'a dit que Iago et Simba avait été un jour des dinosaures. Sûrement qu'il étaient des Chientosaurus. Ça me fait penser qu'on devait creuser dans le jardin pour trouver des os de dinosaure.
J'applaudis le super saut de Gipsy, quand j'aperçois celui que j'ai battu à coup de terre dans les yeux. Lui aussi est assis sur les épaules de son papa et c'est lorsqu'il me voit aussi que je le vois me pointer du doigt. Le sale troll ! Il est en train de me balancer !

- P'pa...P'pa...pose moi, faut que j'ailles faire pipi !

Pas question que je reste planté ici, faut que je m'éloigne de ce fouteur d'embrouille. Galère, son père se rapproche.

- P'pa, vite, dépèche-toi !

La réponse de Mr Potter est courte, presque froide. Ou plutôt non, étant donné qu’il ne me paraît pas être le genre de personne qui se permettrait d’être froid envers ses propres enfants sans raison, elle est courte et impersonnelle. Comme si cela ne le concernait pas vraiment. Ou pour être précis comme s’il désirait instaurer une distance protectrice entre lui et les souvenirs que lui évoque le nom de Peter. Le malaise qui suit sa réponse m’intrigue d’ailleurs d’autant plus. Qui peut bien être cet homme pour que la simple évocation de son nom plombe ainsi l’ambiance ? Car ne croyez pas que je n’ai pas reconnu la technique de Matt visant à détourner l’attention des gamins pour ce qu’elle est. Il est très doué à ce petit jeu-là mais j’ai été suffisamment de fois le destinataire de tentatives similaires pour ne pas savoir les détecter à des kilomètres. Néanmoins je suis suffisamment bien éduqué pour ne pas relancer la discussion dans une direction qui rend Mr Potter visiblement inconfortable. Outre que me mettre le père d’Alix à dos serait une idée stupide, je ne joue pas avec les sentiments des autres. Du moins pas quand la situation est grave. Et les réactions de Matt me laissent entendre qu’elle l’est tout au moins un peu. Je tourne par conséquent à mon tour mon regard vers Gipsy et dois reconnaître que je suis passablement impressionné par les capacités de l’animal. A tel point que je demande à voix haute :

-Le spectacle est toujours d’un tel niveau ?

Non parce que d’habitude je ne me préoccupe pas trop des attractions principales quand je viens à la fête de la Citrouille mais ça va peut-être changer selon leur réponse. Néanmoins, la prise de parole de Luka ramène de nouveau l’attention de tous vers lui et je me demande bien ce qu’il se passe. Parce que pas besoin d’instinct parental pour savoir qu’il y a anguille sous roche. Et si j’en crois le rouquin qui se rapproche avec un air énervé en tirant par la main un homme lui ressemblant comme deux gouttes d’eau tout en désignant Luka du doigt, on va vite savoir ce qu’il se passe.

-C’est lui ‘pa ! Y m’a poussé et y m’a mis d’la terre dans les yeux, c’était pas d’ma faute en fait !

Le type a l’air un peu perdu, j’ai comme l’impression qu’habituellement ce n’est pas lui qui gère la partie « gamins » du couple. Il fait néanmoins une brave tentative.

-Ah euh et bien …

Son regard oscille entre Matt et Mr Potter ne sachant apparemment pas auquel des deux s’adresser. Finalement, la ressemblance physique entre les gosses et leur père semble lui permettre de se décider.

-Excusez-moi mais mon fils affirme que s’il a déclenché l’incident au barbecue c’est uniquement parce que le vôtre l’aurait poussé et lui aurait lancé de la terre dans les yeux. Je ne sais pas quoi en penser mais je considérais utile de venir vous en informer. Enfin je…

Ah apparemment les explications c’est son fort mais la confiance en soi pas vraiment. Enfin, on va bien voir comment Mr Potter réagit. Parce qu’à en croire les regards haineux que les deux mioches se jettent, il y a probablement du vrai dans les propos des rouquins.

C'est pas dans les yeux que j'aurais dû lui mettre de la terre...mais j'aurais mieux fait de lui faire manger à ce rapporteur. Je me suis défendu, j'ai pas à m'excuser. C'est vraiment pas juste et encore moins cool de la part de mon P'pa. Si je n'ai pas mon mot à dire, alors autant que je me taise pour toujours. Une chance que je n'ai pas de baguette...

Je ne répond même pas. Je n'ai même pas envie d'en reparler, si c'est pour ne pas prendre ma défense, ça ne sert à rien. En attendant, je préfère encore me changer les idées en regardant Gipsy...quelque chose se prépare.

D'un coup, la musique s'arrête. Des tambours commencent à chanter. Tarouik annonce le numéro final. Les tambours continus. Gipsy semble très concentré, lorsque tout d'un coup, il s'élance pour lever ses deux pattes arrières. Tout le monde applaudit et la musique reprend lorsque Gipsy se met à avancer sur ses pattes avant. Il a dû faire beaucoup de gym pour en arriver-là. Gipsy fait plusieurs tours, sous les applaudissements, jusqu'à ce que Tarouik lui demande de retourner sur ses quatre pattes. J'applaudis avec Léo, jetant un rapide coup d’œil sur l'imbécile, j'espère que la terre lui gâche bien la vue.

On dirait bien que le spectacle se termine. Tarouik applaudit aussi Gipsy et lui fait saluer tout le public. J'aurais bien aimé que le spectacle dur un peu plus longtemps, ça aurait retardé ma punition.

En tout cas, j'espère que Gipsy redonnera bientôt un autre spectacle.

La capacité à gérer la situation de Mr Potter m’impressionne. Ça me rappelle mes années à Poudlard lorsqu’il devait régler les conflits entre élèves. A vrai dire, je n’ai que rarement eu l’occasion de le voir à l’œuvre en classe. Les Serdaigles ne sont pas particulièrement portés sur la dispute alors quelle que fut l’autre maison avec nous, c’était le plus souvent assez calme. Mais j’ai pu l’observer plus d’une fois au boulot lorsque deux élèves s’en était pris l’un à l’autre dans un couloir et il était assez doué pour éviter que ça ne dégénère. Bon, en tant que directeur des Gryffondor, quand les principaux impliqués appartenaient à sa maison et à celle des Verts-et-argent – ce qui arrivait avec une certaine fréquence reconnaissons-le – parfois on sentait une certaine difficulté de sa part au moment d’être impartial. Néanmoins, malgré le ressentiment de certains Serpentards, je ne l’ai jamais vu faire preuve de favoritisme, même pas envers Alix.

Quoiqu’il en soit, il réussit à diffuser la situation et les rouquins repartent d’où ils étaient venus, non sans que Matt ait d’abord donné au père quelques conseils pour traiter les yeux de son gamin, ce qui est assez rare pour être noté. Bon, les deux gosses ont toujours l’air renfrogné mais c’est un détail mineur au regard de ce qui aurait pu se passer. On tourne donc tous de nouveau notre attention vers le grand final du spectacle et, rien à dire, je ne suis pas déçu. L’animal est en train de défier toutes les lois de la physique et de l’évolution à la fois alors qu’il se transforme en bipède le temps de quelques tours de piste.

Mais, alors que je m’interroger une fois de plus sur les méthodes d’entraînement que Tarouik a dû mettre en œuvre pour arriver à de tels résultats, une voix hautaine que je reconnaîtrais entre mille attire mon attention. Je tourne donc mon regard vers la droite et, comme prévu, Gwen et son petit groupe d’amies sont assises sur un banc en train de discuter de Merlin seul sait quoi. Certainement pas du spectacle en tous les cas parce qu’aucune d’entre elles n’accorde ne serait-ce qu’un regard au dromadaire funambule. Peu importe à vrai dire car je vais bien vite m’en informer. Je n’ai en effet pas vu ma sœur depuis la rentrée et l’occasion est trop belle pour discuter quelques instants avec ma cadette pour la laisser passer. En tant qu’élève de Poudlard, elle n’a que rarement l’occasion de quitter le château alors, pour une fois qu’on est au même endroit, je vais en profiter. Surtout désormais que le spectacle touche à sa fin et que je peux donc prendre congé sans paraître impoli. Je me tourne donc par conséquent vers les deux porteurs d’enfant et désignant du doigt le groupe de Serpentardes m’explique :

-Je viens d’apercevoir ma sœur et ses amies, je voudrais donc en profiter pour lui dire bonjour. Mr Potter, ce fut un plaisir de vous revoir. Matt, on se voit au boulot. Léo, Luka, content de vous avoir rencontré. Et n’oubliez pas, le meilleur farceur est celui qui ne se fait pas attraper.

Et, avec un dernier signe de main rapide – après mon conseil aux jumeaux, je préfère ne pas trop m’attarder sait-on jamais la réaction que pourrait avoir leur père – je me dirige vers les septièmes années sur ma droite. En arrivant à proximité, je prononce le nom de ma sœur et elle lève les yeux. Un instant, je vois ses yeux briller de plaisir à ma vue puis elle remplace sa joie par son masque habituel de tranquille indifférence et je ne peux retenir un sourire de mon crû. Ouh je vais m’amuser à embêter Gwen devant ses amies, c’est moi qui vous le dit !

Le meilleur farceur est celui qui ne se fait pas attraper ? Avec Léo, on se regarde; on fera mieux la prochaine fois, en attendant on a une glace à se mettre sous la dent. Je pensais même que P'pa avait oublié ma punition, mais pas de bol, je vais devoir trouver un nouveau vêtement pour Arkos. Léo me regarde avec de grands yeux; je sais, ça va pas être facile, mais je n'ai jamais échoué à une punition. Arkos changera de t-shirt, qu'il le veuille ou non, je vais pas lui laisser le choix...je vais achever cette punition en un temps record, du jamais vu.

Mon plan ? Trouver LE t-shirt qui va obligatoirement plaire à Arkos. C'est vrai qu'il commence à se faire vieux son t-shirt, mais il n'a jamais voulu s'en débarrasser, pourtant M'man et P'pa ont bien essayé. J'imagine déjà leur tête quand ils verront Arkos avec un nouveau t-shirt, c'est sûr qu'ils ne vont pas en revenir. Je suis pressé de retourner à la maison pour commencer les recherches, j'espères que Léo compte m'aider, parce que j'ai comme l'impression qu'il va me falloir plus que mes deux mains pour arriver à trouver le nouveau vêtement d'Arkos.

En attendant, je profite de ma glace au chocolat chaud, alors qu'un petit feu d'artifice explose sur la langue de Léo. Ça à l'air marrant comme glace aussi. Ensuite, il a fallut retrouver M'man qui discutait un peu plus loin avec une dame que je connaissais pas. Comme d'habitude, M'man nous a demandé si tout s'était bien passé, avec Léo, on s'est dépêcher de hocher la tête, au cas où P'pa ou Matthew viendrait à parler. M'man nous regarde quelques minutes, comme si elle essayait de lire nos pensées, mais je crois pas qu'elle sache faire ça...quoi que Léo en est moins sûr que moi. Il trouve parfois bizarre qu'elle devine certains de nos faits et gestes bien avant qu'on puisse avoir le temps de les réaliser. P'pa fait la même chose, même Alix qui a des yeux derrière la tête...avec Léo, on a pas encore eu le temps de vérifier. Hermy, elle a le pouvoir des devoirs, on peut pas éviter de faire nos devoirs quand elle est dans le coin; Im-po-ssible ! En fait, y reste R'mus...il voit rien venir, on peut tout faire et ça marche.

J'espères que P'pa ne va rien dire à M'man, je crois que je vais me faire discret jusqu'au retour à la maison.