« Avec un peu d'imagination, on peut très bien vivre toute sa vie en un soir. »
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(#) ♣ « Avec un peu d'imagination, on peut très bien vivre toute sa vie en un soir. »
par la plume de Invité ϟ Posté Mer Juil 25 2012, 21:54
Yolanda jeta un regard au miroir. Elle était parfaite. La Mangemort avait enfilé une belle robe noire, et rendu ses cheveux irréprochables. En outre, les traits de son visage paraissaient incroyablement détendus, ce soir. Et puis ses yeux pétillaient. Et quelque chose d’un peu joyeux étirait les coins de ses lèvres. Ce soir, elle allait vivre.
L’air de septembre lui semblait doux, maintenant. Et agréable. Bien sûr, elle sentait toujours ce ver affreux lui ronger le cœur. Et les sens. Bien sûr. Mais elle pensait à autre chose. Moins d’Ariane. Moins de John. Autre chose.
Il s’appelait Théodore Crewe, et faisait partie des dirigeants des Mangemorts. Crewe. Elle avait l’impression que ce nom la suivrait jusqu’à la tombe. Ce nom… Ce nom, et puis leur candeur, et la naïveté qu’on lisait dans leurs yeux bleus. Quoique. Lui se démarquait des autres. Il ni naïf, ni candide ; et il était brun.
Théodore Crewe. Cela faisait plusieurs années que Yolanda le fréquentait au cours des réunions de Mangemort, mais elle n’avait pas encore eu le plaisir de découvrir son identité. Et de faire le rapprochement. Seulement, il était monté en grade, récemment. Il faisait désormais parti des chefs, des dirigeants, ceux qui secondaient le Seigneur des Ténèbres et qui avaient le droit de retirer le masque, assumant pleinement leur nom.
Crewe. Cela sonnait comme une promesse délicieuse à ses oreilles. Crewe. C’était la passion. Et la douleur. La douleur… Et les abîmes sans fin. Sans fond.
Elle avait tressailli. Puis cherché dans les vieux grimoires. Généalogie des Sang-Pur ; le nom des héritiers des plus grandes familles étaient consignés là. Alors Yolanda avait trouvé. Et frissonné de nouveau. C’était son frère.
Son frère. L’un Mangemort influent, et l’autre membre de l’Ordre. Comme c’était singulier… Théodore était l’aîné, même. Plus âgé qu’elle et Jonathan de deux ans. Normalement, il devrait héritier du Manoir et de la fortune qui étaient revenus à John. Ces découvertes avaient laissées Yolanda Yeabow pensive. Mais elle avait une occupation, un but qui ne la désespérait plus.
Alors elle avait davantage observé cet homme. Théodore. Son regard charmeur déstabilisait ; ses yeux bruns pétillaient ; son visage était différent. Sans son nom, jamais elle n’aurait pu soupçonner qu’il s’agît de l’oncle de sa fille. Elle l’avait détaillé. Il était très beau. C’était un sorcier qui avait une situation, aussi. Directeur du département de la Justice Magique. Yolanda avait ri, d’un rire amer. Ce Mangemort-là, cet inconnu, ce Théodore, il représentait tellement le type d’homme qu’elle aurait pu aimer, à défaut de pouvoir aimer John ! Riche, Mangemort, issu d’une longue lignée et croyant aux valeurs du Sang. Parfait. Ils se ressemblaient tellement ! Oui. Parfait. Elle aurait dû choisir un tel homme. L’aimer. L’épouser peut-être. Un homme comme le frère de John.
Non. Non. Bien sûr. Evidemment qu’elle avait souffert, évidemment que ce n’avait pas été simple, mais elle avait eu Ariane. Et elle avait aimé Jonathan, comme jamais elle ne pourrait aimer quiconque. Yolanda avait eu le droit de goûter à quelques heures, quelques mois de bonheur intense et délicieux. Ensuite, c’était lorsqu’on connaissait le malheur et le désespoir qu’on appréciait davantage d’être heureux, n’est-ce pas ? Et puis que ferait-elle d’un mariage. Elle tenait trop à sa liberté. Non pas que le mariage était pour elle synonyme de prison, mais se retrouver enchaînée à quelqu’un qu’elle n’aimait pas l’encombrerait bien. Yolanda Yeabow avait besoin de solitude. Comme elle avait besoin de ses livres. Et d’Ariane. Et de John.
Au bout d’un certain temps, elle s’était décidée, et avait décidé d’aborder le beau brun. Il l’avait regardée étrangement, lorsqu’elle avait parlé de Jonathan. Quand elle lui avait dit qu’il était bien singulier de trouver un frère parmi les Mangemorts, et un autre membre du Phœnix. Au moment où elle avait parlé indirectement d’Ariane, se présentant comme la mère de sa nièce, il n’avait pas voulu comprendre et avait tout nié. Yolanda rit en se remémorant les émotions lues dans ses yeux. Non, ce n’était pas de la peur… Non, bien plus… Bien plus beau, bien plus subtil. Oh, elle brûlait d’en savoir plus. Ce que Jonathan avait caché serait-il une de ses faces obscures ?
Deux semaines s’étaient écoulées. Les chemins de Yolanda et Théodore s’étaient croisés de nouveau. Cette fois, c’était lui qui était venu la voir. Ils avaient parlé, beaucoup ri. Il fallait avouer qu’il y avait quelque chose de charismatique sur ses traits, quelque chose de follement attirant. Il avait terminé l’entretien sur une invitation à dîner. Ravie, Yolanda avait laissé tomber son masque méprisant, pour une fois, et accepté, presque de bon cœur.
L’enseignante vérifia une dernière fois qu’elle était irréprochable avant de transplaner dans les rues de Londres. Le ciel était sombre, il était sept heures. La pluie menaçait. Elles étaient belles, les rues de Londres.
Yolanda fit quelques pas, puis retrouva la rue du quartier sorcier où ils s’étaient donné rendez-vous. Son sourire s’élargissait au fur et à mesure qu’elle avançait. Bientôt, elle le vit et s’approcha de lui. Apparemment, il venait de transplaner. Sept heures sonnaient. Sept heures précises. Il était pile à l’heure. Parfait. Oh oui, il était parfait. Très beau. Délicieux.
« Toujours à l’heure, n’est-ce pas, Mr Crewe ? » Sourire amusé. Yolanda aimait l’appeler Crewe. Elle devinait que ça le tuait. Et même si Théodore reniait sa parenté avec Jonathan et Ariane, elle s’était mise en tête de le lui faire avouer ce soir. « Alors, où est-ce que tu m’emmènes ce soir, Théodore ? »
La Mangemort se sentait incroyablement à l’aise. En réalité, elle l’était pratiquement avec tous ses semblables, se sachant supérieure hiérarchiquement. Ils lui devaient tous le respect. Elle se tourna vers Théodore, et quelque chose brillait dans son regard. Une lueur à la fois provocatrice, amusée et épanouie.
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(#) ♣ Re: « Avec un peu d'imagination, on peut très bien vivre toute sa vie en un soir. »
par la plume de Invité ϟ Posté Jeu Juil 26 2012, 01:44
Soupirant, Théodore tendit sa veste au majordome, qui effectuait des courbettes respectueuses. Sans un regard pour l'homme qui s'inclinait, l'homme, au visage fatigué et las, pénétra dans le salon jouxtant la pièce d'entrée. Il enleva sa cravate, déboutonna sa chemise, alluma un de ses cigares et, en tirant dessus, se laissa tomber dans son fauteuil fétiche. Dure journée. Il avait eu envie d'étrangler une bonne dizaine d'hommes et était tombé sur son crétin de frère, en passant dans le bureau des Aurors. Pourquoi avait-il choisi le département où ce dernier travaillait, déjà ? Ah oui, cette foutue jalousie, ce foutu orgueil, qui l'avait poussé à prendre ce poste pour montrer à Jonathan qu'il lui était supérieur. Combien que ce dernier ne s'en préoccupait qu'à peine ?
D'une main tremblante, sa rage contenue dans ses membres, Théodore tira une nouvelle fois sur son cigare. Foutue journée, vraiment. Il y en avait, des comme ça, on souhaitait qu'elle n'existât jamais. Il fallait qu'il se divertisse, ce soir - demain était Samedi, il aurait tout le temps de récupérer ( tout en suivant précautionneusement ses horaires, on ne le changerait pas). Oui, il devait sortir, jouer, dîner, peut importait, il lui fallait simplement... Se relevant brusquement, en jetant un regard alarmé à la pendule, au dessus de la cheminée, Théodore jura. Yolanda ! Il l'avait complètement oubliée, avec cette journée. Il était six heures et demie, le rendez-vous était fixé à sept heures, de ce qu'il s'en souvenait ; il avait le temps de se préparer à la hauteur de son invitée.
Tout en grimpant ses escaliers de marbre, se dirigeant vers sa chambre, Théodore repensa à la manière dont ce rendez-vous avait été prévu. Trois semaines plus tôt, quartier général. Une réunion entre membres influents, entre chef mangemorts, venait de se terminer et Théodore rentrait chez lui, pour affronter de la paperasse, quand une voix féminine l'avait interpellé. Il l'avait immédiatement reconnue ; il s'agissait de Yolanda Yeabow. Il se souvenait, il y a quelques années, elle avait remplacé le maître. C'était quelqu'un d'important, de très important, et il l'avait toujours respectée. Néanmoins, il ne s'était jamais plus intéressée à elle. Certes, elle était charmante, forte et sang-pur, mais Théodore préférait ne pas jouer avec des personnes aussi importantes qu'elle, sur un plan aussi personnel. Aussi avait-il été considérablement surpris qu'elle l'interpelle ainsi, d'autant plus qu'il ne s'agissait pas d'une discussion professionnelle. Yeabow lui avait alors sorti des âneries, des stupidités qu'il ne voulait pas entendre, pas dans cet endroit, chez les Mangemorts, où elles n'avaient jamais mis les pieds auparavant.
Pourtant, elle avait tout brisé. Elle avait parlé de Jonathan. Elle avait prononcé le lien qui les unissait. Elle avait également cité leur différence ; il était le mal quand Jonathan était le bien. Là, Théodore s'était contenté de ne pas lui répondre, tentant de lui faire comprendre que tout ceci ne la regardait pas, et qu'il ne voulait plus rien entendre de ce qu'elle avait à dire. Pourtant, elle avait continué, elle avait dit une plus grosse idiotie encore, et Théodore avait compris qu'elle se fichait de lui : comment autrement pouvait-il expliquer les propos de Yolanda ? Elle aurait une fille, avec son frère. Son nez s'était retroussé élégamment et, sans l'injurier, tel qu'il l'aurait fait avec n'importe qui d'autres, Théodore lui avait simplement intimé qu'elle se trompait de personne, qu'il n'avait pas de frère et encore moins de nièce. La haine était alors remontée en lui, se mêlant avec cette jalousie qui jamais ne le quittait.
Pourquoi devait-on lui rappeler l'existence de ce frère partout où il se trouvait ? Et pourquoi elle, pourquoi Yolanda Yeabow en personne, elle qui avait semblé ne jamais réellement le considérer ? Tout s'emêlait, lui paraissait bien trop étrange. Puis, lentement, l'idée qu'elle puisse avoir dit la vérité c'était faufilée dans son esprit. Après tout, qu'en savait-il, de la situation familiale de son frère ? Il avait perdu tout contact avec lui depuis qu'il avait intégré les mangemorts. Les années avaient défilées, depuis, et Jonathan aurait tout à fait pu agrandir sa famille. Mais avec cette Yolanda ? Cette Yeabow, cette chef des Mangemorts, cette raciste absolue ? Jonathan n'aurait même pas accepté de poser les yeux sur elle. Alors comment ? Est-ce que tout cela était véridique ?
Durant deux semaines, son esprit avait été torturé par ces questions, les réponses qu'il s'imaginait et les différentes supputations qu'il faisait. Cela l'empêchait presque de dormir, son cerveau se mouvait en tout instant. Vrai, faux ? Si vrai, comment l'exploiter ? Si faux, comment l'oublier ?
Puis, finalement, il avait décidé d'y croire. Y croire et l'utiliser. Cette femme, cette enfant aussi, elles étaient parfaites pour qu'il poursuive sa vengeance, petit à petit. Pour qu'il ait eu un enfant avec elle, Jonathan avait dû l'aimer, au moins un peu. Alors, il la lui volerait. Il fera de Yolanda la sienne, il ira également capturer le coeur de leur fille. Il se fera aimer des deux, jusqu'à surpasser ce crétin de frère et lui offrir sa place de second, toujours. Il fallait qu'il devienne premier dans leur esprit.
Alors il était retourné vers elle. Il lui avait souri, à Yolanda, et il avait remarqué qu'elle appréciait. Il se disait que cela serait simple, qu'il y arriverait facilement. Alors il conjuga tous ses efforts là-dessus ; il devait charmer Yolanda Yeabow. Pour le moment, ce n'était que stratégique, mais il fallait avouer qu'elle n'était pas désagréable à voir, loin de là. Et, quand elle souriait vraiment, elle avait de légères fossettes qui se creusaient ; Théodore s'était surpris à en raffoler. Non, vraiment, elle était belle. Très belle. Trop, peut-être, pour que cela soit sans danger.
Le maître de maison cligna des yeux, revenant brusquement à lui. Il devait se dépêcher, il ne supporterait pas d'être en retard. Il enfila un pantalon noir, une chemise noire également, laissant les deux derniers boutons ouverts en une fausse nonchalance, débordant de classe. Il arrangea rapidement ses cheveux, sourit à son reflet puis revêtit une veste noire, également, avant de sortir de sa chambre. Il glissa un cigare dans sa poche intérieure, sa baguette dans sa manche, et quelques gros billets dans ses poches. Il était prêt.
Cette soirée, il lui fallait être parfait. Déterminant. Charmeur, aussi, au possible. Il devait la faire rire, la rendre insouciante et heureuse, un instant à ses côtés, pour qu'elle en redemande et en vienne à ne pouvoir se passer de lui. Un rictus fleurissant sur ses lèvres, Théodore tourna sur lui-même, transplanant. Il était pile à l'heure, évidemment. Sept heures sonnaient encore.
Son regard se perdit dans les alentours et finit par se poser sur une femme tout à fait charmante, se rapprochant de lui. Ses lèvres se relevèrent, ses yeux petillèrent. Elle était superbe, charmeuse. Tout en elle attirait. Les hommes devaient lui tomber aux pieds, en fera-t-il parti ? Il espérait avoir plus de classe, de dignité peut-être, pour cela. Alors qu'il s'approchait d'elle, Théodore entendit sa voix s'élever, amusée. Le sourire qu'il arborait se crispa.
Crewe. Toujours, cette appelation. Yolanda semblait l'adorer, tandis qu'il l'exécrait. Crewe. Un rappel constant à cette famille qu'il reniait, à ce frère qu'il souhaitait oublier, en vain. Crewe, Crewe, toujours Crewe ! Ce nom ne le laissera-t-il jamais en paix ?
Cachant son irritation, Théodore saisit la main de sa compagne et y déposa un baiser.
« La ponctualité est une de mes priorités, comme tu sembles l'avoir remarqué, ma chère Yolanda. »
Il laissa retomber sa main, observant son visage aux traits plus légers et détendus qu'à l'ordinaire. Il se demanda si sa présence la soulageait, l'apaisait. Elle lui demanda où il l'emmenait. Prenant son bras, Théodore l'attira contre lui et, croisant son regard enjoué, lui sourit, mutin :
« L'endroit où je t'emmène est une surprise, j'espère que tu aimes cela ? »
Il avait commandé une table, aussitôt le rendez-vous fixé, dans un restaurant luxueux et chic, à la hauteur de leur rang, de leur position. Lorsqu'il avait remarqué dans les yeux de Yolanda cette lueur d'orgueil, d'air hautain, Théodore avait tout de suite compris qu'elle était comme lui ; trop peut-être. Il espérait qu'ils s'entendraient bien, mieux encore que lors de leur précédente entrevue. C'était toujours plus facile de charmer une personne que l'on appréciait.
« Alors, dis-moi, Yolanda, » reprit-il en la guidant à travers les rues du quartier sorcier de Londres,« ne t'ennuies-tu pas, à Poudlard ? Demeures-tu par envie, là-bas, en tant que professeure ? Tu es si brillante, une infinité de propositions et de choix s'offriraient à toi, si tu envisageais le monde extérieur ! »
Il s'était toujours demandé pourquoi une femme comme elle, si intelligente, logique et maline, faisait au collège, alors qu'elle excellerait dans tant d'autres endroits, comme elle l'avait fait à la tête des Mangemorts. Après tout, s'il devait la charmer et passer la soirée avec elle, autant satisfaire sa curiosité ; et Yolanda savait pertinemment comment la titiller.
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(#) ♣ Re: « Avec un peu d'imagination, on peut très bien vivre toute sa vie en un soir. »
par la plume de Invité ϟ Posté Jeu Juil 26 2012, 15:27
Yolanda détailla son compagnon. Avec ses yeux bruns rieurs, ses cheveux sombres, et son statut de Mangemort, au sein d’une famille de traîtres à leur Sang blonds et candides, comme il devait faire tâche ! D’ailleurs, cela se sentait bien matériellement ; il n’avait hérité ni de leur Manoir, ni de leur fortune. Elle réprima un nouveau rire à la saveur moqueuse, et se concentra davantage sur Théodore. La chair et le sang de Jonathan. Issu du même père, et de la même mère. Qu’est-ce qui les rendait si différent ? Yolanda allait le découvrir. D’abord, bien sûr il faudra lui faire avouer leur lien de parenté. Et Merlin ce que ce sera amusant… ! Elle avait déjà remarqué cette lueur qui brillait dans les yeux de Théodore quand on parait de son frère… Cette lueur qui cachait quelque chose… Oh, oui, à coup sûr, elle se divertirait beaucoup ! Et puis, il était beau… Objectivement, bien plus beau, bien plus élégant, plus attirant que son frère !
Lorsque Yolanda choisit de l’interpeler par son nom de Crewe, il frissonna ; encore une preuve de son étroite parenté avec John ! A peine l’avait-elle rejoint qu’il s’empara de sa main pour l’embrasser ; la Mangemort frémit. C’était le frère de John. Un bout de Jonathan, aussi. La chair de sa chair, et le sang de son sang. D’ailleurs, il n’y avait que cela qui l’intéressait, n’est-ce pas ? Le fait que ce soit le frère de John. Oh bien sûr, il était parfait… Et elle était certaine de passer une merveilleuse soirée en sa compagnie… Mais il lui rappelait trop son frère. A chacun de ses mouvements. Elle en venait à regretter l’absence de John. Théodore était en quelque sorte une substitution, une consolation.
L’enseignante resta pensive un moment. Ses sentiments étaient incompréhensibles. Aimer Jonathan, quand tout la portait vers son aîné ? Cela n’avait pas de sens… Non. Il fallait l’oublier. Yolanda était là pour oublier, aussi ; la perspective de passer la soirée avec Théodore l’avait rendue heureuse et légère, comme elle ne l’avait pas été depuis longtemps, depuis des années peut-être. Oui. Oui… Oublier. Ne plus y penser. Seulement savourer l’instant présent, savourer le cadeau de l’oubli qui s’offrait à elle.
Yolanda sentit le regard de Théodore sur elle, et son sourire s’élargit. Déjà, il lui saisissait le bras et l’attirait à lui ; il y avait une étincelle malicieuse dans son regard. Faible, assoiffée d’un peu de tendresse, elle se laissa faire, rieuse. Même son odeur était tout à fait différente de celle de Jonathan.
« Une surprise ? Pas plus qu’autre chose… » Non ! Ne reprend pas cet air blasé, Yolanda ! C’est ta chance d’être un peu heureuse, de sourire, juste un soir, empoigne-la ! Ne la laisse pas filer, ne laisse pas ce regard délicieux se détourner de toi !
Il avait commencé à la guider à travers les rues de Londres ; elle le suivait. Il lui demanda si elle tirait un réel plaisir à enseigner à Poudlard, elle qui, selon ses dires, pourrait briller ailleurs. « Tu me flattes, cher Théodore. », répondit-elle. « Et toi ?», s’empressa-t-elle de riposter, amusée, « ne t’ennuies-tu pas, à passer toutes ces journées au Ministère ? Voir chaque jour les mêmes employés imbéciles, les mêmes têtes stupides, les mêmes dossiers assommants ? Bien sûr, je ne doute pas que pouvoir diriger à un niveau si haut soit grisant, et que les secrétaires qu’on t’assignent se plient en quatre pour égayer ton quotidien, mais quand même… » Yolanda n’était pas vraiment méprisante, ni moqueuse, mais elle aimait son métier, elle aimait la vie à Poudlard, et trouvait cela bien plus amusant qu’un emploi au Ministère. « C’est vrai que… Je n’ai jamais beaucoup aimé Poudlard… Mais le Seigneur des Ténèbres a besoin de Mangemorts à l’école, et il faut avouer que l’enseignement… est une profession très amusante… Oui, vraiment, très divertissant. C’est une certaine forme de puissance, que de pouvoir enseigner… » Devait-elle s’ouvrir à lui, lui faire confiance et lui exposer son cœur et ses pensées ? Elle ne s’était jamais confiée qu’à Jonathan, auparavant… « L’Histoire de la Magie me fascine. Le savoir et les livres m’ont longtemps captivée… Alors… La promesse d’une vie passée dans les livres et dans l’étude m’a charmée plus que tout autre chose… » Elle reprit. « Et c’est très, très intéressant. Les jeunes sorciers, chacun des habitants du futur magique, je les connaitrais tous. Ils auront tous été mes élèves, j’aurais découvert leurs forces et leurs faiblesses à chacun. C’est très divertissant que de les observer et de jouer avec leurs émotions. » Oui, Yolanda Yeabow était quelqu’un de très bas, quelqu’un qui aimait manipuler et prendre les gens pour ses marionnettes – espérons que ça ne rebute pas ce cher Théodore. « Aux yeux du Seigneur des Ténèbres, nous sommes des atouts. Et puis, cela me permet de garder un œil sur… sur ma fille, que je n’ai pas le droit de voir en dehors de Poudlard. » La Mangemort avait hésité à mentionner de nouveau Ariane, ne souhaitant pas gâcher l’instant présent, mais ses derniers mots pourraient chatouiller la curiosité du beau brun. Non, Jonathan n’était pas un ange – et cela, Théodore paraissait l’ignorer, ou du moins ne pas vouloir s’en rendre compte. « Mais dans quelques années, si le Lord juge utile de me placer au Ministère de la Magie, je ne refuserais pas… »
Ils marchèrent encore un peu, jusqu’à atteindre un superbe restaurant. Elégant et classe, c’était un endroit tout à fait convenable, qui convenait à la noblesse de leur rang. Décidément, cet homme était tout à fait irréprochable et frisait la perfection.
Yolanda lui adressa un nouveau sourire tandis qu’ils s’installaient face à face. Quelque chose de malicieux brillait dans les prunelles de la Mangemort. Les Crewe étaient décidemment des gens mystérieux, et pleins de secrets. Elle connaissait Jonathan depuis maintenant quinze ans, avait passé beaucoup de temps au Manoir Crewe, sans jamais avoir entendu parler d’un quelconque aîné. Oh, Théodore et elle allaient passer une excellente soirée, décidément. Il n’était pas dans les habitudes de Yolanda Yeabow de jouer cartes sur table ; il fallait être patient, pour mieux savourer les fruits de ses efforts. Elle n’allait pas manquer de délicatesse, ni rien ; elle allait y aller lentement… « Alors comme ça, tu es fils unique ? » Le jeu commençait.
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(#) ♣ Re: « Avec un peu d'imagination, on peut très bien vivre toute sa vie en un soir. »
par la plume de Invité ϟ Posté Ven Juil 27 2012, 09:01
Son bras avait lentement glissé vers la hanche de Yolanda et Théodore la tenait maintenant contre lui, tandis qu’elle répondait à ses diverses questions. En voyant qu’elle ne faisait que lui retourner ses questions, en adaptant la situation, le jeune homme eut un petit sourire en coin. Elle était adorable, bien que ce ne fût pas le premier terme qui vienne normalement à l’esprit en voyant Yolanda Yeabow.
« Mais quand même, rien du tout, ma chère Yolanda. C’est en effet très grisant d’avoir le pouvoir sur des centaines d’hommes, d’avoir tout leur dossier sous la main, de savoir la moindre chose de leur vie, pouvoir utiliser cela, manigancer contre eux, virer d’un simple geste une personne que tu n’aimes pas… Tu as le pouvoir, quand tu es à ce poste. Avoue-le, Yolanda, c’est bien plus excitant que de surveiller des gamins, des idiots qui n’écoutent pas le trois quart de ce que tu leurs dis ! »
Alors qu’ils tournaient dans une ruelle au style bien plus chic et moderne que la précédente, toujours dans le genre vieux Londres, Yolanda lui admit finalement qu’elle n’aimait pas plus que cela Poudlard et, qu’en vérité, si elle restait, c’était pour la passion de la matière. Théodore eut un regard entendu, il comprenait tout à fait les passions, ce genre de choses qui nous poussaient à rester, à continuer, malgré tout. Ses yeux restèrent fermés une seconde de plus lorsque ses paupières clignèrent. Oublier. Il fallait oublier Jonathan, son père, l’amour qu’il leur avait autrefois porté. Il fallait oublier Jonathan, son père, la haine qu’il leur portait à présent. Il lui fallait tout oublier, surtout ce soir, surtout avec cette femme qui lui disait connaitre Jonathan personnellement. Il devait oublier cette ombre, juste une soirée, et profiter réellement de la jeune femme, pour la charmer, la connaitre, arriver à la désirer – et le chemin ne sera pas long, pour ce dernier point. Elle était charmante, charmante, et oh combien désirable !
Mais, déjà, elle continuait. Elle lui expliquait le point important, aussi, la chose intéressante à être professeure du collège Poudlard. Et, lentement, Théodore sentit un frisson remonter dans son dos. Elle était comme lui. Exactement comme lui. Trop comme lui. La même manière de penser, d’utiliser les choses. Une passion, aussi, une passion véritable qui avait, ou qui embrasait toujours les cœurs. Un rang, une dignité, un sang pur. Elle était parfaite. Elle aurait été parfaite si elle n’était pas passée par Jonathan avant lui, comme s’il n’était que consolation. Son sourire se crispa, en pensant cela, puis il se détendit. Evidemment, qu’elle devait l’utiliser. Elle était comme lui, ne venait-il pas de le penser ? Alors elle l’utilisait, comme lui usait d’elle.
Vengeance. Elle était sa vengeance. Si ce qu’elle disait était vrai, son frère, sa nièce, elle-même peut-être, s’aimaient surement, et lui, le frère tâche, celui dont on ne parlait plus au Manoir Crewe, allait briser tout cela, briser cet amour et le prendre en entier pour sa personne. Yolanda allait l’adorer, l’aimer, plus puissamment qu’elle n’avait jamais aimé, il se le jurait. Ou, du moins, si il n’arrivait pas à cet amour passionné qu’elle devrait lui porter, il la ferait l’aimer, un peu au moins, pour que son satané frère s’en morde les doigts. Et cette nièce, cette nièce qu’il ne connait pas, dont Yolanda venait tout juste de reparler, il allait l’adorer, oh bien sur, l’adorer quand elle haïra elle aussi son satané père et qu’ils s’allieront, se complairont dans le mal, la jalousie et la haine ! Cette nièce l’aimera plus qu’elle n’aura jamais aimé son père, cela, il se le jurait, plus encore que pour Yolanda. Parce qu’un enfant est bien plus important, n’est-ce pas ? Combien de fois Jonathan lui avait dit cela, lorsqu’ils étaient enfants. « Moi, je n’abandonnerai jamais mon enfant, je l’aimerais de tout mon cœur, parce qu’un enfant, c’est la chose la plus importante au monde ! » Oh, mon cher Jonathan, Théodore te croit, assurément, et il va aussi te montrer combien un enfant peut être détestable, combien ce dernier peut, lui, refuser de t’aimer.
Théodore cligna des yeux. Yolanda ne parlait plus de sa fille, enchainait sur le fait qu’elle ne refuserait pas si le Lord souhaitait la placer au Ministère. Jugeant qu’il n’avait pas été assez réactif, pour ne pas l’interrompre surtout, il décida de reprendre un de ses précédents propos. Sa fille. Il devait s’assurer qu’elle existait vraiment, que ce n’était pas un jeu de cette femme, une simple folie.
« Tu parlais de ta fille, Yolanda. Me permets-tu de revenir dessus, le sujet peut-être difficile pour toi ? » demanda-t-il poliment avant de poursuivre, sans attendre un quelconque assentiment ; Théodore Crewe n’avait pas besoin de cela pour s’exprimer. « Tu dis ne la voir qu’à Poudlard ; cela ne doit pas faciliter les échanges, je me trompe ? Ta fille n’est-elle pas gênée d’avoir une mère professeure, au point de t’éviter dans les couloirs ? Et, si j’ose, pourquoi ne la vois-tu qu’à Poudlard, cette enfant ? »
Mais, déjà, ils arrivaient au restaurant. Lorsque la porte s’ouvrit, tenue par un majordome tout de blanc vêtu, Théodore murmura :
« Nous reparlerons de ta fille plus tard, l’endroit te plait-il ? »
Le sourire qu’elle lui adressa le conforta dans l’idée que son choix était parfait, comme toujours. Il recula sa chaise, tint sa main pour l’asseoir, puis la baisa lentement avant d’aller prendre place à son tour. Un majordome arriva, tendit les cartes et Théodore commanda, demandant soigneusement les plats que souhaitait Yolanda. Une fois que la chose fut terminée, Théodore sortit un cigare de sa poche, l’alluma de sa baguette puis tendit une fine cigarette blanche à Yolanda :
« Tu fumes ? »
Tirant sur son cigare, il expira lentement avant d’ajouter brusquement :
« Quel impoli je fais ! La fumée ne te gêne pas, j’espère ? Dis-le-moi, si c’est le cas, j’arrêterais. »
Yolanda semblait plus amusée qu’autre chose, aussi Théodore décida-t-il de garder son tabac en main. Puis, posant un regard pétillant sur elle, il allait lui poser une question sur sa fille quand la Mangemort lâcha une bombe. Alors comme ça, tu es fils unique ? Son sourire se crispa, ses yeux se ternirent. Fils unique, oui. Evidemment. Après tout, c’était tout à fait le cas, n’avait-il pas été éradiqué du testament, banni par son père, oublié par son frère, haï par les deux, et réciproquement. Oui, il était fils unique, Jonathan n’était rien. Oh, c’aurait été tellement plus simple, oui, si Jonathan n’était rien. Théodore retrouva son sourire, tira sur son cigare et, alors que la fumée s’élevait autour d’eux, disparaissant bientôt, il répondit :
« Fils unique, oui. Je n’ai pas de frère, ni de sœurs, mes parents se contentèrent pleinement de mon génie, de la personne incroyable que je suis, vois-tu ? » ajouta-t-il avec un léger sourire amusé, cachant une ironie profonde.
Oh oui, il était incroyable, intelligent, un sacré génie, évidemment ! Après tout, s’ils avaient fait Jonathan, c’était juste pour le faire redescendre sur Terre, pour qu’il puisse se comparer à quelqu’un d’atrocement nul, d’ignoble, évidemment. Pourquoi n’avait-il pas envisagé les choses ainsi plus tôt ? Son rictus ironique battant le sourire amusé, Théodore renversa la tête sur son dossier et tira une nouvelle fois sur son cigare, calmant son cœur qui battait trop vite d’une jalousie jamais éteinte.
« Tu es fille unique aussi ? Ou bien d’autres déesses de ton sang foulent également notre sol ? » s’enquit-il en reposant son regard sur elle, ses prunelles brillant d’un air charmeur.
Il était doué, dans le changement d’humeur, Théodore, atrocement doué.
« Et ta fille, unique également ? » ajouta-t-il alors, profitant du sujet pour revenir sur ce qui l’intéressait.
Il avait bien remarqué, la bombe, la question faussement anodine de Yolanda ; il ne savait pas pourquoi elle voulait lui faire avouer sa parenté avec Jonathan, celle qui l’avait amené à lui, et peu lui importait, mais elle ne serait pas la seule à jouer. Lui aussi avait des choses à comprendre, et il comptait bien rentrer chez lui en ayant tout saisi, pour que le prochain rendez-vous lui serve plus encore. Ils étaient démoniaques, Yolanda et Théodore ; si semblables, si différents pourtant. Serpentard, surement ?
« Tu parles souvent d’elle, ta fille doit être adorable. Quel nom porte-t-elle ? Te ressemble-t-elle ? Si c’est le cas, elle doit être majestueuse, ma chère, » conclut-il avec un énième sourire en coin.
Oui, c’était quelque chose qu’il ne pouvait qu’admettre. Yolanda était majestueuse et il adorait les reines. C’était un danger, n’est-ce pas ?
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(#) ♣ Re: « Avec un peu d'imagination, on peut très bien vivre toute sa vie en un soir. »
par la plume de Invité ϟ Posté Ven Juil 27 2012, 11:30
Ils venaient d’arriver au restaurant lorsque Théodore parla d’Ariane. Il avait des questions, oui… Il était très, très curieux. Assurément, c’était le frère de Jonathan – un frère totalement opposé, qui pour d’obscures raisons reniait sa parenté avec lui, et le laisser s’approprier un Manoir qui lui revenait de droit. Si Yolanda se sentit raidir lorsque son compagnon se montra trop inquisiteur, elle tenta de se calmer un peu, mais ne put s’empêcher de susurrer : « Nous reparlerons de ma fille si j’en ai envie. » Le souvenir vague de son empoisonnement l’assaillit de nouveau, violemment, et elle dû lutter pour ne pas se retrouver en proie aux larmes devant son compagnon. Elle ne s’était pas doutée que ça ferait aussi mal…
D’un sourire, elle lui assura, se reprenant, que l’endroit était parfait, et ils s’installèrent. Théodore lui baisa la main de nouveau, l’aida à s’installer, puis tira un cigare et proposa une cigarette à Yolanda. « Non, merci. » Elle ne fumait pas, non.
La phrase que Yolanda lâcha ensuite eut l’effet d’une bombe. Avec une avidité de rapace, elle se délecta de voir ses yeux se ternir et son sourire se crisper. Oui, il était fils unique. Non, il ne cesserait pas de nier. Têtu, comme elle. Trop comme elle. Le jeu se corsait.
« Oh… Bien sûr… Merveilleux… Dans ce cas, tu dois être en mesure de pouvoir me faire visiter le Manoir Crewe, un jour. J’ai toujours rêvé de voir à quoi il ressemblait… », susurra-t-elle, provocatrice. Elle était sûre d’elle. Trop sûre d’elle. Yolanda avançait en terrain risqué, et bientôt elle ne pourrait plus reculer. Oui… C’était le moment de s’arrêter… Mais elle savait qu’elle ne pourrait pas ; la flamme terrible qui s’allumait dans les yeux de Théodore lorsqu’elle mentionnait son frère l’intriguait énormément. Et l’amusait trop. En outre, l’enseignante sentait que Théodore brûler de tirer certaines informations d’elle – c’était parfait. Ce serait donnant-donnant ; Théodore pourrait se délecter de la savoureuse histoire de Jonathan et Yolanda Yeabow, connaître toutes les circonstances de la naissance de leur fille, à condition de lui offrir la sienne. Son histoire. Sa vérité. Répondre à ses questions. Elle n’ouvrira pas son cœur à n’importe qui ; il fallait être prudent avant d’accepter un Mangemort.
Il la flattait, il la charmait… Quel homme délicieux ! Terriblement beau, terriblement charismatique… Et bien sûr ils se ressemblaient follement… Yolanda détailla ce visage divin, ce personnage élégant ; il y avait quelque chose de fort qui se dégageait de Théodore, une aura qui lui plaisait bien. « Oui, je suis fille unique… D’ailleurs je crois que ma famille aurait préféré pas avoir d’enfant du tout… », répondit-elle, pensive. Elle se souvint de sa mère, cruelle mère, dont elle avait tant pris, sans le vouloir. « Et ma fille l’est également, oui. C’est peut-être pour cette raison que nous sommes tant attachés à elle… Nous n’avons qu’elle… », laissa échapper Yolanda, certaine de titiller de nouveau la curiosité de Théodore. Il voulait en savoir plus sur Jonathan, n’est-ce pas, sur la fille de Jonathan ? Peut-être pensait-il l’utiliser dans le but d’une revanche personnelle ? Non. Yolanda était tout à fait pour le fait de faire mal à Jonathan, mais personne ne se servirait de sa fille. Elle voulait connaître les intentions de Théodore, il faudrait qu’elle comprenne, qu’elle lise en lui, qu’elle devine et déduise, comme elle savait si bien le faire.
Encore des questions sur Ariane. Presque uniquement des questions sur Ariane. Ariane…
Sa respiration qui se coupait. La tasse qui se brisait. Son corps qui basculait en arrière. L’air, qu’elle cherchait vainement à inhaler de nouveau. Et les yeux d’Ariane… Les yeux bleus d’Ariane… L’indifférence d’Ariane. Comme un poignard.
Yolanda ne répondit pas tout de suite aux questions de Théodore. De toute évidence, c’était lui, c’était le frère de John, et il avait reconnu en Ariane sa nièce. La sorcière était restée, pensive, crispée, rêveuse, toute encore plongée dans ce souvenir terrible de la tentative de matricide d’Ariane. Sans qu’elle ne puisse s’en empêcher, ses yeux s’humectèrent de nouveau – oh, très légèrement ! – et elle tendit à Théodore la photographie qu’elle avait toujours sur elle. C’était une petite fille âgée d’une douzaine d’année, aux cheveux blonds et aux yeux bleus si caractéristiques – l’âge où elle n’était encore que le portrait parfait de son père. Aujourd’hui, il fallait avouer que la froideur de son visage lointain la faisait davantage ressembler à Yolanda, mais cela, Théodore ne pouvait pas le savoir.
« C'est Ariane. Tu vois bien que je ne te mens pas. Maintenant, s’il te plaît, cesse de jouer. Ton frère n’est pas un ange, tu sais. Je peux te raconter… je peux te raconter ce qui s’est passé, toute l’histoire depuis le début – et je te certifie que tu la trouveras très à ton goût. Si tu veux faire du mal à Jonathan, je te suivrais délibérément, mais je préfèrerais avant cela que tu cesses de me mentir. » Elle avait accompagné ses paroles d’un sourire et sa voix était caressante, mais il y avait quelque chose dans ses prunelles qui flamboyait, et elle avait employé sans le vouloir le ton dur et direct d’une femme d’affaire.
Ils furent interrompus, avant que Théodore n’ait le temps de répondre ou de réagir, par l’arrivée des plats commandés. Yolanda lui jeta un dernier regard malicieux avant qu’ils ne commencent à manger. Cependant, son cœur battait un peu trop fort. Il fallait qu’il joue le jeu, qu’il cesse de s’entêter. Elle n’aurait pas la patience de continuer bien longtemps, et elle craignait que son impulsivité ne prenne le dessus de nouveau, comme cela venait de se produire.
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(#) ♣ Re: « Avec un peu d'imagination, on peut très bien vivre toute sa vie en un soir. »
par la plume de Invité ϟ Posté Ven Juil 27 2012, 17:27
Les plats arrivaient. Avec un sourire poli, Théodore dégagea la serviette posée devant lui pour que le serveur puisse déposer son plat. Il saisit le verre de vin qu’on venait de lui remplir et le leva pour trinquer avec Yolanda, devant lui. Yolanda. Sa dernière tirade ne quittait pas son esprit et, il devait l’avouer, le troublait totalement. Comment était-il réagir ? Que lui dire ? Yolanda venait de lui affirmer qu’elle l’aiderait à faire du mal à Jonathan tant qu’il lui disait la vérité. Certes, mais n’avait-elle pas dit plus tôt qu’elle n’avait jamais visité le Manoir ? Alors comment pourrait-elle avoir eue une relation avec son frère ? Tout cela était tordu, immensément tordu. Et puis, cette gamine, cette Ariane. Elle l’avait dit, ils étaient très attachés à elle. C’était parfait, génialissime. Mais Théodore se doutait que, par conséquent, Yolanda refuserait qu’il se serve de la petite, d’Ariane, pour arriver à ses fins, pour décupler la vengeance. Il lui faudra faire cela discrètement. Juste lui dire qu’il avait voulu la rencontrer, pour voir si sa nièce était plus comme la femme qu’elle était que comme l’imbécile d’homme qu’était son frère. Son frère. Devait-il lui avouer ? Oui. Oui, il ne devait plus mentir. C’était des bêtises, elle était totalement au courant, et cela ne le rendait que puéril de cacher la vérité ainsi. Théodore doutait qu’elle est la patience d’écouter ses sottises, sachant la vérité, plus longtemps.
Théodore reposa son verre de vin, saisit sa fourchette et murmura :
« Bon appétit, Yolanda. »
Il commença à manger un moment, en silence ; seule la musique classique du restaurant et leur couvert sur les assiettes faisaient du bruit. Théodore devait avouer qu’il ne savait atrocement pas comment commencer, comment s’y prendre. Lui avouer, tout d’un coup ? Le sous-entendre ? Il se doutait qu’il ne pouvait s’y prendre avec Yolanda comme il le ferait avec tout stupide employé, elle était bien trop comme lui. Finalement, levant des yeux pétillants vers elle, il fit :
« Ainsi, si j’ai bien compris, tu veux savoir toute la vérité ? Avant tout, sache que je ne t’ai pas vraiment menti, Yolanda, » commença-t-il en arborant son petit rictus fétiche, « Je me considère et suis considéré comme fils unique, tous membres de la famille Crewe se damnerait s’ils devaient avouer notre lien de relation. Je suis simplement le fils de ma mère, n’ait ni père ni frère, c’est ainsi. Cependant, tu le savais, je suis le frère de Jonathan. Jonathan Crewe, un ange, n’est-ce pas ? Si généreux, si aimant. Tu lui as surement succombé pour cela, un de ces amours passionnels que lui seul est capable de générer, » ajouta-t-il en portant son verre à ses lèvres.
Il en but une gorgée, ses pensées faisant défiler toutes les jeunes filles qui avaient refusé ses déclarations à cause de son frère. Son rictus s’agrandit et il secoua légèrement la tête avant de la relever vers Yolanda. Ses yeux détaillèrent son visage fin, admirablement bien taillé, ses lèvres pulpeuses et son regard pétillant, joyeux, amusé presque ; Théodore comprenait totalement pourquoi son frère l’avait accepté, pourquoi il lui avait fait une fille, pourquoi peut-être il en était tombé amoureux. Soudainement intéressé par l’histoire qu’il aurait pu vivre avec Yolanda, qu’elle avait promis de lui raconter, Théodore décida de lui dire la vérité, de tout lui raconter, tout ce qu’il n’avait jamais dit à personne. Yolanda lui serait utile, certes, mais rien ne l’empêchait d’être un minimum honnête avec elle. Puis, ainsi, ils sauront tous les deux le pourquoi de leur sentiment respectif envers Jonathan. Oui, il allait lui dire. Il allait lui dire. Il voulait lui dire. Alors, pourquoi les mots se coinçaient dans sa gorge ? Pourquoi il n’y arrivait pas ? C’était stupide, ce n’était pas comme si cela avait une quelconque importance, au final. C’était juste Jonathan, ce connard de Jonathan et le putain d’amour qu’il lui avait un jour porté, comme tout bon grand-frère.
« Notre histoire est terriblement cliché, » parvint-il finalement à dire, en reposant son verre de vin. Il planta son regard dans les prunelles de Yolanda et reprit : « Mon frère avait tout l’amour de mon père, qui ne m’en avait jamais véritablement témoigné, à vrai dire. Alors… Tu t’en doutes, la jalousie est montée. Je ne comprenais pas ce qu’avait Jonathan de plus que moi, pour qu’il l’aime lui, et pas moi. Je ne comprenais pas pourquoi on disait qu’il serait un géni, alors qu’on ne m’avait jamais dit quoique ce soit. Je ne comprenais pas pourquoi il avait créé un tel engouement lorsqu’il avait fait ses premiers pas dans la magie alors que mon père n’avait fait que me gronder pour le bazar commis ce jour-là. Je ne voyais que des injustices, partout, tout le temps. Et, pourtant, je n’arrivais pas à les détester, pas encore, je les aimais trop. C’était mon père, mon frère. Et puis, Jonathan était si adorable, si gentil ; il m’aimait tellement. Je ne pouvais le haïr. Puis, il a été réparti à Gryffondor. J’étais à Serpentard. Père a été tellement, tellement fier de lui ! Je n’en pouvais plus. Il ne m’avait même pas félicité pour ma répartition. C’est puéril, j’en ai bien conscience, mais quand tu vis depuis des années dans cette compétition, cette comparaison, et que tous les efforts que tu fais sont réduits à néants sans que ton si adorable frère ne fasse un mouvement, tu ne peux que te mettre à le détester, le jalouser puissamment. Au fil du temps, il a fait clairement son choix, tout comme j’ai fait le mien. Je suivais ma mère, qui m’inculquait les vraies valeurs, celles qui valent le coup d’être défendues, tandis que Jonathan suivait mon père, qui lui apprenait le respect de chaque race, même de ses idiots de sang-de-bourbes. » Son nez se plissa de dégout, tandis qu’il prenait une bouchée de son plat, n’ayant pas réellement faim. Il soupira, poursuivit : « J’entrais chez les Mangemorts, lui rejoignait l’Ordre ennemi. Tout nous séparait, à présent, et il était toujours le gagnant, le gentil et adorable petit Jonathan, tandis que j’étais le paria, le méchant, celui qui ne mérite pas le nom des Crewe. Je n’étais pas un traitre-à-mon-sang, tu comprends, c’est si mal ! » fit-il ironiquement, sirotant une gorgée de vin, « Mon père me banni, donc, me déshérita, moi l’ainé, moi qui aurais du tout avoir, et tout revint à Jonathan. Il m’avait tout pris, totalement. Ma place d’ainé, ma place de premier, ma place sur le testament. Que va-t-il me voler, prochainement ? Il m’a tout pris. Je n’ai rien, rien sinon une place au Ministère accordée grâce au Lord, et non réellement mes qualités. Je n’ai absolument rien, rien sinon la jalousie et la haine sanglante qui ne me quittent jamais. » Ses yeux se foncèrent, l’étincelle de rage se ralluma et sa main se mit à trembler sur la table. Un cigare, il lui fallait un cigare. Mais, avant, terminer son récit, une bonne fois pour toute. « Je le hais, Yolanda, sais-tu ce qu’est la haine ? Je le déteste, l’exècre, souhaite le voir disparaitre. J’aurais aimé qu’il n’ait jamais vu le jour, jamais, tout aurait été tellement plus simple, » cracha-t-il en guise de conclusion.
Sa main se glissa aussitôt dans sa poche et il en sortit un cigare. Il l’alluma brusquement, tira et expira longuement.
« Excuse-moi de fumer durant le repas. C’est une nécessité. »
Il tira une seconde fois, se massa lentement une tempe de sa main libre puis reprit plus calmement :
« Voilà, tu sais tout. Enfin, non. Je veux me venger. Je veux le faire souffrir. Je veux qu’il sente qu’il n’est que le second, qu’il n’est rien et, qu’un jour, il finira écrasé. Je veux qu’il sente qu’il est inutile, qu’il est remplaçable, comme il me l’a fait sentir. Je veux qu’il souffre, Yolanda, » susurra-t-il en braquant son regard dans le sien.
Oui, Théodore voulait le faire souffrir, profondément, usant de ses faiblesses à outrances. Et, ses faiblesses, c’était cette femme, Yolanda Yeabow, qui allait les lui apporter. Il en était certain. Il le sentait, au fond de lui. Il savait qu’il avait bien fait de tout lui dire, de retourner vers elle, de l’avoir invité à diner. Elle allait l’aider, lui dire. Il le sentait. Aussi, Théodore se pencha vers elle et, les lèvres près de l’oreille de la Mangemort, il murmura :
« Tu peux m’aider, à le faire souffrir. Tu veux lui faire du mal, tu es un génie. Je veux le blesser, je suis manipulateur. Ensemble, nous le torturons jusqu’à ce qu’il ne puisse en supporter davantage, jusqu’à ce qu’il ploie et retrouve son rang de larve, de traitre, d’inutile. Tu peux m’aider, Yolanda. »
Elle pouvait l’aider. Peu importait à Théodore les raisons, il savait juste qu’elle le pouvait et, qu’avec elle, il serait plus fort que jamais. Qu’avec elle, ce serait un jeu d’enfant. Il avait besoin d’elle. Plus que jamais. C’était fini, les tentatives de séduction, les petites flatteries. Elle méritait plus, de son importance. Elle méritait une alliance, une véritable alliance, peu importe sa nature. Elle méritait l’honnêteté, même s’il avait oublié ce que c’était. Il avait simplement besoin d’elle. Elle, Yolanda Yeabow.
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(#) ♣ Re: « Avec un peu d'imagination, on peut très bien vivre toute sa vie en un soir. »
par la plume de Invité ϟ Posté Ven Juil 27 2012, 22:19
C'est drôle ! On peut très bien marcher, sourire, traverser les rues et être mort...
Alors c’était cela… La jalousie… Yolanda avait entendu parler de cela… La jalousie, la rivalité entre frères… Elle avait lu cela, étudié les conséquences terribles qui en avaient été le fruit… Sans néanmoins se retrouver face à un exemple concret. Jonathan lui apparaissait soudain sous un jour plus sombre. Moins parfait, moins héroïque. Plus naïf, plus niais, plus stupide. Lâche aussi, et inconscient. Et ce frère, ce Théodore parfait laissé dans l’ombre, ce Théodore blessé, il lui rappelait un peu elle, aussi. Elle, qui s’était laissée apprivoiser par le merveilleux Jonathan, et qui en avait payé le prix.
Et maintenant, il essayerait de rendre Jonathan jaloux ? De le faire souffrir… ? Oh, combien cela la tentait ! Quelle perspective alléchante que de s’allier à cet homme, cet homme fantastique et parfait, si semblable à elle, pour faire tomber et ployer le cerveau de sa destruction ! Yolanda frémit en sentant Théodore s’approcher d’elle, elle frémit, tentée par les promesses merveilleuses qui lui faisait. Non, elle n’écoutait pas son amour, son amour sourd, aveugle et destructeur. Non, elle se laisserait séduire par cet homme, ce frère. Elle serait à Théodore. Théodore, merveilleux Théodore… Yolanda appréciait la manière dont il la respectait, la manière dont il la traitait en égal, en alliée – d’ailleurs, ils étaient parfaitement égaux, parfaitement ressemblants. On aurait les aurait crus faits l’un pour l’autre… « C’est fou ce que nous nous ressemblons, toi et moi… Je te suis, Théodore. Tes projets m’enchantent. Maintenant, tu veux savoir… Tu veux connaître mon histoire à moi, n’est-ce pas ? Celle d’Ariane, celle de Jonathan… »
« Je crois que je n’ai jamais raconté à personne la vérité… Toute la vérité… Cela entache déjà bien ma réputation… Et quelle basse estime tu dois avoir de moi ! Une Mangemort qui s’entiche de… Enfin… » Son cœur battait. Trop fort. Elle ne devait pas. Ne pas se livrer. Ne pas se donner. Elle connaissait la chanson. En offrant son cœur, elle savait qu’on risquait de lui piétiner. Le visage de Kim s’offrit à elle. Beau. Familier. Et cet homme. Trop parfait. Trop semblable à elle. « C’était ma première mission en tant que Mangemort. J’étais… terriblement fière, terriblement heureuse… Je voulais accomplir de grandes choses parmi eux. », commença-t-elle, très doucement. « Et c’était une mission considérable. Infiltrer l’Ordre du Phénix. J’avais vingt ans. » Kim. Kim, sa voix de velours, ses cheveux d’or, ses yeux candides. « Pour ne pas éveiller les soupçons, on m’a préalablement fait boire du Polynectar. Je devais prendre l’apparence d’une autre femme, une jeune fille blonde, et me faire passer pour elle. Kimberley Field. » Une lueur amoureuse brilla dans ses yeux lorsqu’elle se souvint et évoqua sa première rencontre avec celui qui allait la détruire. « Ton frère n’est pas un ange, Théodore. Lui aussi, c’était sa première mission en tant que membre de l’Ordre du Phénix, et il avait pour but de vérifier que je… que j’étais une recrue fiable. Et je… oh ! Je te jure que je ne voulais pas… ! Je me croyais bien au-dessus de cela ! Surtout Jonathan… Mais je… je suis tombée amoureuse. Terriblement amoureuse. » La voilà, Yolanda Yeabow, offerte dans toute sa faiblesse, dans toute sa fragilité – la belle, la grande, l’inaccessible Yolanda Yeabow, qui s’était donnée sans hésiter une seule seconde à un traître, un sorcier au rang si bas qu’il ne méritait même pas son nom, même plus son sang. « Je… Je ne sais pas par quel miracle j’ai découvert qu’il partageait mes sentiments. Je ne pouvais plus me raisonner, j’étais folle, je ne savais plus, j’avais perdu toute ma lucidité… », tenta-elle de justifier, comme si ces paroles l’excusaient. Une lueur terrible éclairait des yeux fous. « Alors, je lui ai menti. Nous nous sommes aimés, mais je lui ai menti. Il a aimé Kim Field, la blonde, et moi je m’oubliais dans ses bras, j’oubliais Yolanda Yeabow. Au bout d’un an seulement, la réalité me rattrapa. J’étais enceinte. Par précautions, j’ai quitté Jonathan. Sans laissé la moindre trace. Je suis devenue Yolanda Yeabow, et je crois qu’il l’a très mal vécu. Puis, lorsqu’il a découvert la vérité, il a été terrible » Elle marqua une pause. S’étaler ainsi à un inconnu ne lui ressemblait pas« J’ai mis au monde Ariane, puis pendant deux ans j’ai eu le droit d’être heureuse. Je n’ai jamais aimé quelqu’un comme cet enfant. Je… Elle a été tout mon univers, tout. J’ai été elle, je n’ai vécu que par elle. J’avais vingt ans, j’étais mère, et j’étais prête à sacrifier toutes mes années de jeunesse à cette enfant, ma position au sein des Mangemorts, mon avenir… Je… Nous avons été incroyablement heureuses, je n’ai jamais connu cela… » Les prunelles de Yolanda brûlaient maintenant intensément. « Déjà je lui voyais un futur merveilleux… Je nous construisais un avenir radieux, ensemble… Ma vie s’enflammait, ma vie prenait un sens, et cette enfant qui était moi et Jonathan elle… Je… » Les mots ne suffisaient plus ; les mots ne suffiraient jamais à exprimer cette douloureuse passion de la maternité, cette triste abnégation qui enflammait les sens, amour ardent, enflammé, terrible et immuable. « C’était un soir très sombre. Ariane avait deux ans. Et ce fut alors qu’ils jaillirent des ténèbres. Trois. Ils étaient trois silhouettes sombres, sorties des ténèbres. Trois contre un. » Rire ironique. Il y avait dans sa bouche un goût amer. Yolanda repoussa son assiette.
« Ils m’ont attaquée, et je me suis battue. J’ai défendu mon enfant comme j’ai pu, sans comprendre ce qu’on me voulait vraiment. Et puis j’ai vu… J’ai vu deux grands yeux bleus luire dans la pénombre… un éclair vert fondre sur ma fille… » Elle se crispa toute entière. « … avant de perdre connaissance. Le lendemain, Ariane avait disparu. On m’avait fait croire sa mort.» Soit forte, Yolanda ! Il te méprisera bien s’il découvre que tu es restée faible ! Non. Ne lui montre pas la profondeur de tes plaies, le sang encore vif de tes blessures… Soit forte, Yolanda. « Non, Jonathan n’a pas été un ange. Il m’a détruite. J’ai voué dix ans de ma vie au mal. Pendant dix ans de ma vie, j’ai été morte, j’ai été anéantie, j’ai été une coquille vide. Après mon écart, lors de ma première mission, il était impensable de songer pouvoir remonter de nouveau, dans la hiérarchie ; pourtant, j’ai été brillante. Quelque chose d’inhumain me guidait, quelque chose d’affreux me poussait à faire le mal. Plus jamais une de mes missions n’a pas été accomplie à la perfection – ma seule erreur fut, un jour, de succomber à la l’amour. » Faible sourire. « Mais la vie, sans Ariane ! Oh ce n’était plus la vie ! J’étais morte, rongée de l’intérieur. Je vivais, je marchais, je respirais, mais j’étais morte ! J’étais une mère qui avait vingt-deux ans, et qui avait vu son enfant mourir avant elle !» Silence. « Il a cru qu’il serait meilleur, plus apte que moi à l’élever. Bref. A Poudlard, j’ai retrouvé une petite Ariane Crewe, qui avait onze ans, qui était belle comme l’enfant que j’avais eue, et qui n’avait jamais connue sa mère. » Un sourire terrible se dessina sur les lèvres de Yolanda Yeabow, un sourire de femme blessée, un sourire d’amante abusée ; c’était le sourire amer de l’âge adulte, vieux, fatigué et aigri ; et c’était ce qui surprendrait Théodore. Non, son frère était loin d’être un ange, loin d’être parfait. Il avait assassiné une femme, trahi une maîtresse, réduit une mère à néant. Et un silence tomba sur eux, un silence lourd de douleurs, lourd du poids des révélations neuves.
« Ariane m’a haïe. Il l’a élevée en faisant d’elle sa parfaite copie, il l’a élevée pour qu’elle me haïsse. Le professeur d’Histoire de la Magie, la Mangemort… Je n’ai rien dit pendant quelques mois. Je voulais qu’elle soit heureuse, et elle l’était près de son père. Seulement, j’avais passé dix ans à me morfondre, dix ans à côtoyer les abîmes du désespoir, caressant la mort parfois. Et tout ce temps, bien sûr… je n’osais pensais à Jonathan… J’avais peur qu’il ne me haïsse à jamais d’avoir perdu son enfant, de n’avoir pas su le garder… » Rire ironique. On est sot, quand on aime. « J’avais besoin d’elle. De poser mon regard sur son visage de Jonathan, voir briller ses yeux, la sentir près de moi. Ils m’avaient rendu sauvages, c’est dix ans. J’ai longtemps hésité à tuer Jonathan, pour la garder avec moi éternellement. Aujourd’hui je le regrette… » Mensonge. « Je l’ai fait enfermer par les Mangemorts, et j’ai repris l’enfant. Je lui ai convoqué pour lui dire : Ariane, je suis ta mère. Et elle est venue emménager au Manoir. Un an. Deux ans. Elle était terriblement malheureuse, seulement. Elle voulait son père, elle aimait son père, et c’est fou ce qu’elle ressemblait à son père ! »
Ils avaient terminé leurs assiettes, terminé le repas. On vint emporter les plats. Elle reprit.
« Au bout d’un an et demi, j’ai rendu le père à l’enfant. Je ne supportais plus de la voir malheureuse avec moi, la Mangemort. Je voulais lui rendre le sourire, je lui ai donné son père. Comme on cède à l’achat d’un jouet après avoir vu son enfant s’ennuyer trop longtemps. Et elle nous a haïs. Tous les deux. Elle ne peut plus voir Jonathan non plus, maintenant. Il lui a caché ma terrible identité lorsqu’elle était enfant, et elle lui en veut. Elle nous déteste de lui avoir menti tout ce temps, de l’avoir fait naître d’un mensonge. Elle nous abhorre, nous méprise. Nous sommes stupides, nous sommes terribles. Je crois qu’avec le temps elle s’est davantage mise à me ressembler – mais ce bien malgré elle, j’imagine… » L’anthrax. Le thé. La tasse qui se brise. L’air qui ne s’engouffre plus dans ses poumons. « J’ai… J’ai été de nouveau la maîtresse de Jonathan quelques temps. Sans que personne ne le sache, comme des enfants qui se cachent. Jusqu’à ce que j’apprenne ses fiançailles avec une certaine Kim Field, qu’il avait pris le soin de me dissimuler. Aujourd’hui ils sont mariés. Toi et moi leur souhaitons bien du bonheur. »
Yolanda avait achevé son récit, et planté son regard dans celui de Théodore ; il émanait d’elle une volonté et une force de fer. Qu’il la regarde, qu’il la voie comme ce qu’elle était. Désormais il la connaissait, il savait son histoire, il savait toute les fragilités de la terrible Yolanda Yeabow. Elle s’était remise toute entière entre les mains de cet homme, comme il s’était remis entre les siennes ; s’il le souhait, il pouvait la briser d’un geste, comme un vulgaire bâton de bois. Oui, elle était faible, oui elle s’était laissée entraînée par les passions humaines, mais elle ne baisserait pas les yeux. Qu’il la regarde !
Le dîner touchait à sa fin. Tout avait été impeccable. « Merci pour tout, c’était délicieux », lâcha-t-elle finalement, dans un sourire. Seulement il la tuait, il la tuait, Théodore Crewe. Il la ramenait à ce dilemme cruel, ce dilemme qui la hantait depuis près de quinze ans. Elle était partagée entre son envie de voir souffrir Jonathan, son envie de lui faire mal, son besoin de le détruire, et son amour pour lui, son amour aveugle, son amour brûlant, son amour malade. Elle ne pouvait pas le voir souffrir et elle devait le faire souffrir… Et il fallait avouer que Théodore l’effrayait un peu, avec ce besoin maladif de faire du mal à Jonathan, ce besoin terrible de le détruire, de l’anéantir. Si elle cherchait à voir les choses lucidement, elle prendrait son parti les yeux fermés ; seulement, cette part faible en elle, cette femme amoureuse en elle tremblait que mal soit fait à Jonathan.
« Je te suis, Théodore. Je suis à toi. Détruisons-le, amusons-nous. »
(#) ♣ Re: « Avec un peu d'imagination, on peut très bien vivre toute sa vie en un soir. »
par la plume de Invité ϟ Posté Sam Juil 28 2012, 17:55
Théodore soupira, se laissant retomber sur son fauteuil, s’étant redressé pour frôler Yolanda, pour murmurer au creux de son oreille, pour lui susurrer une demande, une requête, une supplication, presque. Un serveur arriva, alerté par son mouvement, et se multiplia en questions. « Tout va bien, monsieur ? Monsieur a-t-il besoin de quelque chose ? Une boisson pour monsieur, peut-être ? ». Irrité, il le congédia d’un geste de la main, murmurant sèchement :
« Il n’y a rien, calmez-vous, retournez donc à votre comptoir ! »
Puis, il reposa son regard sur Yolanda Yeabow. Il n’en revenait pas tout à fait, de s’être confié ainsi, à cette femme qui avait fréquenté son frère, qui en était tombée amoureuse. Il était fou, complètement fou, mais avait-il un jour été autre chose ? Ça devait être gravé dans ses veines, marqué à vie. Il était fou, imbécile, ça devait couler dans le sang des Crewe. Après tout, pour avoir fait un enfant à Yolanda, Jonathan ne devait pas être tout à fait sain non plus. Mais, déjà, Yolanda lui répondait, ne le laissant pas penser davantage à sa folie, à la folie des Crewe.
Prenant son verre de vin en main, repoussant légèrement son assiette, Théodore planta son regard dans celui de Yolanda et écouta silencieusement, respectueusement même, ses paroles. Lorsqu’elle lui affirma qu’elle le suivrait, ses yeux brillèrent étrangement et il inclina lentement la tête, dans un merci silencieux mais sincère. Avec elle, oh, avec elle, ses projets de vengeances les plus fous n’étaient plus rien ! Ils étaient à présent démesurés mais, surtout, réalisables, et cela l’emplissait d’une jouissance plus qu’immense. Cachant tant bien que mal son sourire victorieux derrière son verre de vin, Théodore attendit que sa compagne poursuive. Il tiqua lorsqu’elle annonça qu’elle allait lui raconter son histoire, celle de son frère et de sa nièce. Ses yeux étincelèrent d’une lueur intéressée et, patiemment, il attendit que Yolanda trouve le courage de raconter cette partie d’elle-même comme il lui avait fallu creuser au fin fond de son être pour pouvoir lui conter celle de Jonathan.
Et, enfin, elle lui raconta. Elle lui raconta toute la partie sombre de la vie de son frère, tout ce qui brisait l’idéalisation qu’il avait fait de lui, à force d’entendre les éloges qu’on lui attribuait. Elle lui raconta sa romance, l’amour fou qui les avait prit, et Théodore sentit son cœur se tordre. Il l’avait aimé, elle, cette Mangemort, sans se rendre compte de rien, alors qu’il l’avait haït, lui, ce frère qu’il avait, ce lien de chair et de sang. Il avait aimé une inconnue et rejeté un frère. La rage lui creusait le ventre mais il garda le silence, par respect pour cette femme qui semblait en avoir souffert autant que lui. Elle avait souffert de trop d’amour quand lui avait été meurtri d’une insuffisance. Au fond, qui avait été le plus chanceux ? Théodore n’en savait trop rien et cette question lui paraissait même futile, qu’importait les douleurs passées ? Seules comptaient les vengeances futures, les haines rassasiées. Il se concentra, reposa son regard sur Yolanda ; Yolanda dont les yeux brillaient. Gêné, respectant la douleur de cette femme, respectant l’horreur de ce qu’elle lui racontant, il détourna les prunelles et fixa son vin, écoutant précautionneusement.
Elle lui raconta l’enlèvement de sa fille, l’enlèvement, la fausse mort. Les années passées à ne plus vivre, à survivre, parce qu’il le fallait, sans savoir trop pourquoi. Les années, aussi, passées à retrouver le rang qu’elle avait perdu. Là, Théodore ne put qu’admirer cette femme qu’il ne faisait qu’auparavant respecter. Elle avait été détruite, on lui avait volé une part d’elle-même, on lui avait fait croire à sa mort, pourtant elle avait trouvé un moyen de rester en vie, de ne pas sombrer dans le désespoir. Elle avait trouvé un moyen de survivre et d’avancer, de briller, de conjuguer tout son esprit et ses forces dans un seul objectif pour oublier tout le reste. Théodore l’admirait. Il en avait été incapable. Il avait gravit les échelons de la hiérarchie, mais toujours guidé par la soif de puissance qui l’habitait depuis que son frère lui avait volé sa place d’ainé. Et elle… Elle, c’était incroyable.
Théodore reposa son regard sur elle. Elle souriait, et ce sourire lui brisait le cœur, lui, le Serpentard insensible. Il lui brisait le cœur, parce qu’il transmettait toute la douleur de son hôtesse, toute la souffrance accumulée, toutes les brisures que son être avait supportées. Théodore faillit poser sa main sur celle de Yolanda, mais se retint. Il se doutait qu’elle n’apprécierait pas sa pitié, sa compassion. Il se contenta de détourner le regard, de la laisser à son recueillement, à sa prière – la prière adressée aux femmes qu’elle avait un jour été, avant qu’elles ne soient détruites. La laissant à ses pensées un instant, troublé par son sourire, par le silence qui les plombait, Théodore songea que personne ne savait véritablement ce qui se cachait derrière les hommes. Jonathan, yeux bleus, cheveux blonds, avait tout d’un ange, et presque tout le monde en avait été dupé. Pourtant, elle, Yolanda, avait souffert de ce qui se trouvait à l’intérieur, de ce qu’était vraiment son frère. Elle le savait, elle savait son horreur, et venait de la lui transmettre. Théodore était perdu, déboussolé. Ce frère qu’on avait toujours comparé à lui, qu’on avait toujours gratifié n’était, au final, pas mieux que lui. C’était un monstre qui avait brisé des femmes, une enfant.
Il soupira. Reposa son regard sur Yolanda. Sa bouche s’entrouvrait, elle allait reprendre. Théodore reporta son attention sur elle, captivé avant même qu’elle ne dise quoique ce soit. Aussitôt, elle lui raconta. Elle lui raconta comment elle avait repris Ariane, comment elle avait repris sa fille et que cela ne lui avait fait que plus de mal, à elle, à Jonathan et à Ariane même. Il grimaça. Compatit intérieurement. Que des faux-pas, dans sa vie, des faux-pas fatals. Et maintenant, Ariane les détestait tous les deux. Lorsqu’elle dit cela, Théodore se redressa sur son siège, ses yeux brillant d’une lueur nouvelle. Ariane détestait son père ! Elle le haïssait, même. Oh, cela était tellement bon, si parfait ! Ses pensées divaguèrent un instant, imaginant tout ce qu’il pourrait faire de cette enfant, de cette gamine qui haïssait ses parents. Oh, c’était parfait. Puis, brusquement, il revint à lui. Jonathan était marié. Marié. Le choc lui fit entrouvrir la bouche. Il la referma aussitôt, sentant le regard de Yolanda sur lui. Il leva les yeux vers elle, l’observa. Elle avait une force. Elle ne tremblait plus. Elle se fichait, maintenant, de ce qu’il pouvait penser d’elle. Elle avait une histoire terrible, une histoire horrible, et ne devait pas en avoir honte. Lui, il n’avait jamais pensé qu’elle le devrait. Il l’admirait tellement. Et il ne commenterait pas son histoire, il en commenterait rien. Il respecterait toutes ces révélations, en silence, comme Yolanda avait su le faire, ne gâchant pas de paroles futiles l’échange qu’ils venaient d’effectuer.
Mais la dernière nouvelle… Comme d’apprendre que Jonathan avait eu une liaison avec Yolanda, un enfant, savoir qu’il était marié le tuait. Cela lui faisait toujours réaliser, brusquement, méchamment, qu’il ne faisait plus partie de sa vie, qu’il n’en savait rien, sinon ce qui était inscrit dans son dossier. Son dossier. Réactualisé tous les six mois, que Théodore n’avait jamais pris la peine d’ouvrir. Il le ferait, en rentrant. Il le ferait, et il le complèterait. Puis, brusquement, Yolanda rompit le silence, rompit le combat de regards déterminés, par un simple remerciement. Il reposa son verre, lui sourit.
« C’était un plaisir, je suis ravi que cela t’ait plu, » répondit-il en agitant distraitement sa baguette, demandant la note.
Il rangea sa baguette, observa Yolanda. Elle était belle, légèrement chamboulée, son petit sourire aux lèvres. Il ne comprenait que trop bien son frère, qui lui avait succombé. Elle lui ressemblait, aussi, et cela était inestimable. Cette femme était une perle, un bijou qui n’aurait pas du souffrir autant. Elle ne méritait pas tout cela. Théodore rompit le contact visuel. Il n’en savait rien, de ce qu’elle méritait ou non. Il ne devait plus y penser. Il y avait plus important, un objectif qu’il avait presque perdu d’esprit, avec ce récit de dieu. Se venger. Faire souffrir Jonathan. Elle avait dit vouloir l’aider mais, reprise dans ses souvenirs d’amour et de folie passionnelle partagée, la réponse sera-t-elle la même ? Il posa un regard sérieux sur elle, un regard brillant d’une lueur passionnée. Il allait lui demander, s’assurer son soutien, mais elle le devança. Elle le suivait. Elle le détruirait avec lui. Elle était à lui.
Théodore sourit. Son sourire n’avait plus rien de charmeur, ni même d’amusé. C’était un simple sourire heureux, jouissif. Un sourire d’un homme qui avait trop longtemps attendu cet instant, cette certitude qu’il arriverait à son objectif. Jonathan souffrirait. Avec cette femme à ses côtés, il n’y aurait pas d’autres alternatives. Il prit la main de Yolanda, joua avec ses doigts, le regard fixé dans ses prunelles, puis embrassa sa main délicate, l’observant toujours. Un petit sourire charmeur fleurit sur ses lèvres, alors qu’elles étaient toujours posées sur la peau délicieuse. Il releva finalement la tête et susurra :
« Je retiens, Yolanda. Tu es à moi. »
Elle n’eut pas le temps de répondre quoique ce soit. Déjà, le serveur revenait, tendait la note, et Théodore payait. Il se releva, enfila sa veste qu’on lui tendait, puis aida Yolanda a enfiler la sienne. Il lui prit la hanche, retrouvant ses attitudes charmeuses et, en sortant du restaurant, il tourna la tête vers elle, ses lèvres effleurant son oreille.
« Veux-tu poursuivre cette soirée chez moi ? Il me semble que nous avons beaucoup à parler, à réfléchir, aussi. Ce sera plus agréable, plus discret également, d’être en intérieur protégé, » souffla-t-il en s’arrêtant dans la rue, devant une boutique de fleurs où clignotait un panneau « Ouvert 24/24h ».
Alors qu’elle acceptait, Théodore sourit légèrement puis, en un mouvement, disparu, Yolanda à son bras. Ils arrivèrent instantanément dans le hall d’entrée de sa maison. Il eut un pauvre sourire et se tourna vers elle, montrant la pièce des mains :
« Ça ne vaut pas le Manoir Crewe, mais cette maison sait être agréable. J’espère que cela te convient. »
Il lui enleva son manteau puis la guida jusqu’à son salon personnel. D’un mouvement de baguette, il fit venir un domestique, qui s’inclina respectueusement. Il roula des yeux devant les courbettes qu’ils s’obstinaient à faire puis, alors qu’il indiquait un canapé à son invitée, il demanda :
« Un thé, un café, toutes autres boissons, peut-être ? »
Une fois que Yolanda eut opté pour un thé, il lui demanda si elle avait une quelconque préférence de parfum puis ordonna au domestique de rapporter la boisson demandée ainsi qu’un café noir, sans sucre, avec un soupçon de whisky. Il ne buvait pas souvent, au contraire de sa consommation de tabac, mais Théodore estimait que l’occasion valait bien un nuage de Whisky. Rejoignant Yolanda sur le canapé, il garda un instant le silence, les yeux posés sur elle, avant qu’il ne lui sourît et murmure :
« Alors, très chère, auriez-vous une idée pour débuter notre jeu vengeur ? Avant tout, dites-moi, Yolanda, jusqu’où irez-vous pour faire souffrir Jonathan ? » ajouta-t-il, ses prunelles étincelant d’une lueur d’amusement.
A vrai dire, Théodore avait déjà l’esquisse d’une idée mais elle lui semblait légèrement déplacée, osée peut-être, et il souhaitait tâter le terrain avant de la proposer. Son esprit tordu avait déjà associé ses capacités aux possibilités et Théodore en avait aussitôt conclu qu’il lui faudrait user de son charme sans limite. Et il n’y avait qu’une seule personne capable de le recevoir et d’y répondre, dans cette alliance ; Yolanda Yeabow. Allait-elle accepter ce jeu de fausse séduction, s’il osait lui en faire part ? En était-elle capable ? Théodore n’en savait trop rien, mais se doutait que si elle était partante, le jeu serait des plus dangereux. La fausse séduction devait rester fausse. Cette fois-ci, c’était à lui de se demander si il en serait capable ou non.
Il reposa son regard sur Yolanda, attendant sa réponse en souriant toujours. Jusqu’où était-elle prête à aller pour faire souffrir cet homme qui l’avait privé de sa fille ?
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(#) ♣ Re: « Avec un peu d'imagination, on peut très bien vivre toute sa vie en un soir. »
par la plume de Invité ϟ Posté Dim Juil 29 2012, 15:20
J’ai aimé le crime et l’aventure avec toi. J’ai cru il fallait toujours prendre, se battre, que tout était permis.
À lui, à lui… Non… non, elle n'avait pas contrôlé ses dires… Qu'il n'aille pas s'imaginer des choses… Evidemment, Yolanda le suivait ; elle voulait bien partager ses projets, écouter ce qu'il avait à lui dire, se laisser séduire peut-être, mais pas être à lui. Non. Yolanda Yeabow n'appartenait à personne. Elle éloigna de son esprit l'image de Jonathan, et sourit à Théodore qui, déjà, s'emparait de sa main pour y imprimer ses lèvres de nouveau, joyeux.
À lui, à lui… Elle lui avait tout dit, tout ce qu'elle n'avait jamais osé formuler auparavant. Qui d'autre connaissait son histoire ? Qui encore avait idée de combien elle avait souffert ? Jonathan, bien sûr… Mais Jonathan avait été un acteur sur le théâtre de son existence ; c'était lui qui l'avait façonnée et déshumanisée. Théodore était un inconnu. Un homme merveilleux, certes, mais un Mangemort, un étranger. Et elle lui avait tout dit, elle s'était donnée ! Vide, Yolanda se sentait terriblement vide – et nue. Elle n'avait plus le choix, maintenant ; elle lui avait tout dit, et il fallait lui faire confiance.
Mais c'était bien étrange, tout de même… Se dire, se donner… Comme à, à un inconnu… Yolanda avait gardé ces mots longtemps en tête, trop longtemps dans son esprit, depuis des années, des années… Elle avait honteusement brûlé de les partager, ces mots, cette histoire – brûlé qu’on la plaigne, qu’on la comprenne, qu’on l’admire, peut-être. Et maintenant… Maintenant elle se sentait délivrée. Délivrée, et nue. Dépossédée de son histoire, dépossédée de sa force, dépossédée de ses secrets. Son âme était nue, et offerte à cet homme, avec toutes ses faiblesses, tous ses mystères. Théodore. Le frère de Jonathan.
Ils se levèrent. Théodore paya, l’aida à enfiler son manteau, comme si elle n’était pas assez grande pour le mettre toute seule, et ils sortirent. Bientôt, lorsqu’ils furent dans les rues de Londres, il la prit par la hanche, et se pencha sur elle, lui murmurant une invitation. Venir chez lui, continuer à bavarder. Chez lui ? Continuer… ? Yolanda hésita. Elle se sentait de moins en moins à l’aise, de moins en moins forte. Une certaine faiblesse la gagnait, une certaine fragilité. Fragile… fragile… Elle ne pouvait pas rester seule. Pas encore. L’enseignante trouvait malgré tout du réconfort en cet homme, ce Crewe qui savait désormais tout d’elle, et qui paraissait tout de même la respecter. Elle ne partirait pas tout de suite. Elle avait besoin de lui, cet autre à l’âme si similaire à la sienne.
La maison de Théodore était un endroit assez correct. Bien sûr, cela ne valait pas le Manoir Crewe, comme il venait de le lui faire remarquer, mais Yolanda trouvait qu’il s’était bien débrouillé avec le peu qu’il avait reçu. Le Mangemort la conduisit jusque son salon personnel, elle opta pour un thé et ils s’installèrent sur le divan. Une lueur amusée brillait dans les yeux de son compagnon lorsqu’il lui demanda jusqu’à quel point elle irait pour faire souffrir Jonathan. Jonathan…
Elle avait eu l’impression que son fantôme les suivait. Spectre incolore, impuissant, innocent. Son beau Jonathan. Ses lèvres. Ses yeux. Son visage… Faire souffrir Jonathan. Se réunir, et projeter des plans tout aussi terribles que les autres, pour lui faire du mal. Non. Non. Elle le revit. Son regard… Ses lèvres… Le bleu de ses yeux… Et sa voix… Il y avait quelque chose de très doux dans sa voix, quelque chose de merveilleux. Yolanda se demanda si Théodore avait déjà été amoureux. Elle se força à sourire. « Fixons d’abord les règles, mon cher monsieur Crewe. Faites du mal à ma fille, je vous tue. », lâcha-t-elle doucement. Elle se doutait bien que Théodore voulait rendre cette jalousie à Jonathan, mais il était hors de question que sa fille souffre encore. Qu’il se serve de Yolanda, passe encore. Elle se fichait bien de ce qu’on pouvait faire d’elle, maintenant, elle était trop fatiguée, trop blasée… « Bien entendu, ce ne serait pas drôle si nous ne le gardions pas vivant. Je… Je ne sais pas ce que tu projettes de faire, mais je crois que lui rendre la pareille ne marchera pas. J’ai essayé de lui reprendre Ariane, et ça s’est retourné contre moi. Il faut l’atteindre, le menacer, je ne sais pas… Lui montrer que nous tenons le pouvoir. Depuis quelques temps, je nourrissais le projet d’assassiner sa femme, mais je ne peux pas le faire comme ça, seule. Ce serait… tellement mal venu. Et puis il ne souffrira pas. Pas longtemps. Je ne sais pas… » La Mangemort reprit. « Bien sûr, je projette également de lui reprendre Ariane – je ne laisserais pas indéfiniment ma fille entre ses mains – mais ce n’est pas suffisant. Et je ne peux pas m’y prendre tout de suite. Tu as des idées, toi ? » Elle jeta un œil à la tasse de thé. Pourquoi avait-elle demandé du thé ? Par habitude, sans doute… Elle avait oublié qu’elle n’en buvait plus. Mal à la tête. Son visage se fermait, et elle posa sa tête sur l’épaule de Théodore, tout près d’elle, pensive.
Au bout d’un certain temps, après l’avoir écouté répondre, elle se permit : « Je suis fatiguée… Je n’arrive pas à y penser clairement… Je suis désolée, Théodore… Merci beaucoup de m’avoir invitée, merci pour tout… Mais je me sens… Excuse-moi… Je crois que je vais retourner au Manoir… » Elle sourit, d’un sourire sincère et poli à la fois. « C’était un plaisir, j’espère que nous nous reverrons très vite ».
(#) ♣ Re: « Avec un peu d'imagination, on peut très bien vivre toute sa vie en un soir. »
par la plume de Invité ϟ Posté Mar Juil 31 2012, 18:38
Il s’assit en face d’elle. Son sourire ne le quittait pas. Il remarqua l’air crispé de celui qu’arborait Yolanda. Il fronça les sourcils. Serait-elle gênée ? Dérangée ? Avait-il dit, ou bien fait quelque chose ? Théodore avait pourtant fait son possible pour être le plus parfait possible ; seul le moment révélation avait échappé à son contrôle. Il s’était laissé allé, lui avait tout dit, absolument tout dit, et il n’avait pu refouler la passion dans sa voix quand il s’était exprimé à propos de sa haine, de sa jalousie. Il se demanda, alors qu’elle répondait enfin, s’il l’avait effrayé, avec sa passion. Puis, sa question fut soudainement balayée lorsqu’il entendit la condition que lui posait Yolanda. Ne pas faire de mal à sa fille. Il fit attention à ce que son sourire ne s’agrandisse pas. Ne pas lui faire du mal, très bien, mais elle ne l’empêchait pas de s’en approcher, n’est-ce pas ? Elle ne l’interdisait pas de lui parler, de l’utiliser. Il fallait seulement ne pas la blesser et Théodore n’en avait jamais eu l’intention, au contraire ; il voulait qu’elle l’aime, qu’elle l’adore, pas la blesser. Il hocha la tête d’un air entendu et jura :
« Aucun mal ne sera fait à ta fille, ne t’en inquiète pas. Je n’ai pas pour habitude de m’en prendre aux enfants… »
Il se remémora la photographie qu’elle lui avait montré, plus tôt dans la soirée, et sourit doucement en se remémorant son visage, ses cheveux, sa beauté. Ariane était vraiment magnifique. Tenant à le lui dire, il murmura :
« Avant que tu ne poursuives… Je n’ai pas eu l’occasion de te le dire plus tôt, Yolanda, mais Ariane est absolument magnifique. Tout comme toi, si je puis dire… »
Il cessa de sourire, observant intensément la jeune femme. Oui, elle était superbe. Superbe, attirante, charmeuse… Il ferma les yeux, laissa sa tête tomber sur le canapé et respira. Que lui prenait-il ? Il devait seulement l’utiliser. Tremblant, il prit sa tasse de café, qui venait d’apparaitre, et faisant un vague geste à Yolanda pour qu’elle saisisse sa propre tasse, il la porta rapidement à ses lèvres, buvant sans précaution le thé brulant. Le liquide lui brula la gorge et Théodore se repu de cette douleur. Il ferma à nouveau les yeux, reprit une gorgée, écoutant sans la regarder Yolanda, qui poursuivait, se fichant de son impolitesse.
Il fallait lui montrer qu’ils tenaient le pouvoir… Oui, lui montrer que c’était eux, maintenant, les rois et qu’il n’était plus rien, qu’il ne les ferait plus souffrir, que c’était à son tour. Elle avait entièrement raison, bien sur, il fallait être subtil, tout à fait subtil… Elle lui indiqua ensuite avoir voulu tuer sa femme. Sur le coup de la surprise, ses yeux se rouvrirent et se plantèrent en ceux de Yolanda. La tuer ? Seule, elle ne pouvait pas, mais si il s’alliait à elle… Ce serait un jeu d’enfant, une blague. Elle lui apprit alors qu’elle souhaitait également reprendre Ariane. Pour ce point là, il avait une idée, oui.
Il se rapprocha quelque peu d’elle, tandis qu’elle posait doucement sa tête sur son épaule. Théodore se crispa puis souffla, passa une main autour de ses épaules et, des doigts, traça des espèces de rond sur son bras.
« J’ai quelques idées, oui. Une, notamment, pour Ariane. Comme tu le sais, je n’avais aucune idée de son existence. Il doit en être de même pour elle. Tu m’as cependant dit qu’elle haïssait son père… Je le déteste aussi. Je pourrais me servir de cette haine commune pour me rapprocher d’elle, qu’en penses-tu ? Me rapprocher d’elle et, lentement, la faire revenir vers moi, vers toi, vers nous, tu vois Yolanda ? Enfin, je ne sais pas. Ça pourrait blesser la petite, lui donner le sentiment d’avoir été utilisée pour ton bonheur. Tu ne le voudrais pas. Il faudrait faire cela mieux, peut-être. Je ne sais pas. Je n’ai pas d’idées, finalement. Pas que nous puissions utiliser pour débuter, » ajouta-t-il en songeant à son plan de fausse séduction.
Il posa son regard sur son visage, tout près de lui, et vit ses yeux fermés et son air fatigué. Il la releva, alors qu’elle s’excusait de fatigue, de ne pas arriver à penser clairement. Elle voulait partir. Elle ne se sentait pas bien. Il lui sourit, poliment, quoique totalement déboussolé. Il avait bien vu sa fatigue mais pourquoi un tel recul ? Pourquoi partir ainsi, au lieu de rester se reposer ici, au calme ? Il secoua la tête, prit sa main et, la guidant vers la zone où les protections anti-transplanage de la maison étaient enlevées, il murmura :
« Je comprends tout à fait, ma chère, repose-toi bien ; nous nous reverrons rapidement, n’aie crainte. Ce fut un plaisir, oui. Ta compagnie est charmante, Yolanda, charmante. Allez, tu es toute excusée, va donc enlever cet air fatigué de ton visage, » conclut-il en lui adressant un dernier sourire sincère.
Il n’aimait vraiment pas son air fatigué, elle était mieux insouciante, rieuse, mais il comprenait qu’un tel sentiment l’accable après des révélations telles que celles faites ce soir. Il comprenait et devait avouer qu’un poids pesait sur lui, plus fort qu’avant. Après la jouissance d’avoir enfin extériorisé ses peines venaient les remords, les regrets, tous les souvenirs qui s’accablaient sur lui. Adressant un dernier sourire à Yolanda qui transplanait, Théodore se détourna, se dirigea vers son salon et ralluma un cigare. Il tira dessus, laissa retomber sa tête sur le dossier et soupira. Une vague de souvenir déferla dans son esprit et il grimaça. La compagnie de Yolanda était fortement délicieuse mais, oh si douloureuse également. Il devrait plutôt aller dormir, oublier, pour ne pas se laisser aller aux peines, maintenant seul.
RP terminé
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(#) ♣ Re: « Avec un peu d'imagination, on peut très bien vivre toute sa vie en un soir. »
par la plume de Contenu sponsorisé ϟ Posté
« Avec un peu d'imagination, on peut très bien vivre toute sa vie en un soir. »
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